R. C. Owen - Commission ontarienne d'examen

** Version textuelle **

Intitul� de la cause :

R. c. Owen

Sa Majest� la Reine, appelante;
c.
Terry Steven Owen, intim�.

[2003] A.C.S. no 31
2003 CSC 33

Cour supr�me du Canada
No du greffe : 28700.

2003 : 15 janvier; 2003 : 6 juin.
Pr�sents : La juge en chef McLachlin et les juges
Gonthier, Iacobucci, Major, Bastarache, Binnie, Arbour,
LeBel et Deschamps.

EN APPEL DE LA COUR D'APPEL DE L'ONTARIO
(114 paras)

Droit criminel � Troubles mentaux � D�cisions de la Commission d'examen � Norme de contr�le applicable � l'ordonnance de la Commission � Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46, art. 672.78.

Droit criminel � Troubles mentaux � Commissions d'examen � D�cisions de la Commission d'examen � Accus� d�clar� non responsable criminellement pour cause de troubles mentaux � Accus� �prouvant toujours des probl�mes d'abus d'alcool et d'autres drogues et d�montrant une propension persistante � la violence � Commission d'examen ordonnant la prolongation de la d�tention de l'accus� dans un h�pital psychiatrique � L'ordonnance de la Commission est-elle d�raisonnable? � Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46, art. 672.54, 672.78.

Droit criminel � Troubles mentaux � Commissions d'examen � Appel tranch� sur le fondement de la transcription � Preuve additionnelle � Commission d'examen ordonnant la prolongation de la d�tention de l'accus� dans un h�pital psychiatrique � La nouvelle preuve par affidavit, post�rieure � la r�vision, que le minist�re public a offerte a-t-elle �t� exclue � bon droit par la Cour d'appel? � Sens de l'expression "lorsque la justice l'exige" � Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46, par. 672.73(1).

L'intim� a �t� d�clar� non responsable criminellement pour cause de troubles mentaux d'une infraction de meurtre au deuxi�me degr� qu'il avait commise en 1978 dans un �tat de psychose provoqu� par la consommation de drogue. Apr�s une p�riode de d�tention dans diff�rents �tablissements de soins de sant� mentale, il a �t� progressivement remis en libert� dans la collectivit� jusqu'en 1987, lorsqu'il a �t� reconnu coupable de possession d'une arme prohib�e, d'introduction par effraction avec l'intention de commettre un acte criminel et de possession de biens criminellement obtenus. Apr�s avoir purg� sa peine, l'intim� est retourn� en d�tention � l'h�pital o� d'autres incidents de violence sont survenus. De nouveaux efforts ont �t� faits pour le remettre progressivement en libert� dans la collectivit�, mais ses probl�mes d'abus d'alcool et d'autres drogues ont refait surface et il a continu� � d�montrer une certaine propension � la violence. La Commission d'examen a d�cid�, en 1994, 1995 et 1996, de lib�rer l'intim� sous conditions, mais en 1997, le test d'urine de l'intim� ayant r�v�l� la pr�sence de cannabis, l'h�pital psychiatrique a fait savoir � la Commission qu'il ne pouvait d�sormais plus �tre en faveur d'une ordonnance de lib�ration conditionnelle de l'intim� en raison de son abus persistant d'alcool et d'autres drogues et du fait que l'h�pital avait besoin d'une certaine marge de manoeuvre pour "r�agir rapidement � l'aggravation connue du risque".

Par application de l'art. 674.54 du Code criminel, la d�cision de la Commission doit �tre la moins s�v�re et la moins privative de libert�, compte tenu (1) de la n�cessit� de prot�ger le public face aux personnes dangereuses, (2) de l'�tat mental de l'accus� et (3) de ses besoins, notamment (4) de la n�cessit� de sa r�insertion sociale. Au terme d'une audition compl�te, la Commission a conclu que l'intim� repr�sentait un danger important pour la s�curit� du public et ordonn� le maintien de sa d�tention dans un l'h�pital psychiatrique. Devant la Cour d'appel, le minist�re public a voulu renforcer la d�cision de la Commission en produisant de nouveaux �l�ments de preuve par affidavit all�guant que, depuis l'audition tenue devant la Commission, l'intim� avait frapp� un patient et menac� d'en tuer un autre, en plus d'avoir �t� trouv� en possession de drogues interdites. Refusant d'admettre cette nouvelle preuve, la Cour d'appel a r�vis� l'ordonnance de la Commission au regard de la preuve disponible lors de l'audition initiale, annul� l'ordonnance de la Commission jug�e d�raisonnable et ordonn� la lib�ration inconditionnelle de l'intim�.

Arr�t (la juge Arbour est dissidente) : Le pourvoi est accueilli. L'ordonnance de la Commission d'examen n'�tait pas d�raisonnable et doit �tre r�tablie.

La juge en chef McLachlin et les juges Gonthier, Iacobucci, Major, Bastarache, Binnie, LeBel et Deschamps : L'�valuation, par la Commission d'examen des troubles mentaux et des risques pour la s�curit� qui y sont associ�s fait appel � une grande expertise et la norme de contr�le, exprim�e dans l'art. 672.78 du Code criminel, correspond celle de la d�cision raisonnable simpliciter.

La Cour d'appel a appr�ci� � nouveau la preuve et l'a jug�e insuffisante. C'est toutefois � la Commission qu'il revenait de se prononcer � cet �gard et celle-ci a rendu une d�cision que la preuve lui permettait raisonnablement de rendre. Il ne suffisait pas d'avancer que d'autres membres d'autres commissions d'examen auraient pu interpr�ter la preuve diff�remment. Il �tait raisonnable pour la Commission d'examen de conclure qu'en raison de sa capacit� d�montr�e de se livrer � des actes de violence lorsqu'il prend des amph�tamines ou de la coca�ne - maintenant li�e � la preuve r�cente qu'il avait recommenc� � consommer de la coca�ne - l'intim� repr�sentait un risque important pour la s�curit� du public. Le "raisonnement" par lequel elle a tent� de tirer des conclusions du retour de l'intim� � la consommation de coca�ne relevait tout � fait de son champ d'expertise.

La Cour d'appel de l'Ontario a soulign� que l'intim� avait b�n�fici� de lib�rations conditionnelles de1994 � 1996, mais, en 2000, la Commission devait examiner la situation de l'intim� telle qu'elle lui apparaissait en 2000. De 1994 � 1999, les autorit�s de l'h�pital ont �mis diverses recommandations en croyant � tort que l'intim� avait pris des mesures efficaces pour renoncer � l'abus d'alcool et d'autres drogues qui, � leur avis, avait �t� le catalyseur de ses actes de violence ant�rieurs.

Il n'�tait pas d�raisonnable pour la Commission de conclure que sa d�cision �tait la moins s�v�re et la moins privative de libert�, �tant donn� la consommation de coca�ne � laquelle continue de se livrer l'intim� et le risque qu'il repr�sente de ce fait pour la soci�t�. Compte tenu des ant�c�dents d'abus d'alcool et d'autres drogues de l'intim� et de la dissimulation de ces abus, la Commission d'examen �tait convaincue qu'on ne pouvait gu�re esp�rer contr�ler efficacement les habitudes de consommation de l'intim� avec la surveillance ponctuelle qui pourrait �tre exerc�e sur lui apr�s sa lib�ration dans la collectivit�.

L'intim� affirme qu'il a droit � une lib�ration inconditionnelle parce que, s'il commet de nouvelles infractions sous l'influence de la drogue, il sera passible, comme n'importe qui d'autre, des sanctions pr�vues au Code criminel. Or, il ne s'agit pas de "n'importe qui d'autre". Il s'agit d'un d�tenu non responsable criminellement chez qui il existe un lien entre l'abus de drogues et sa propension � la violence, y compris au meurtre, et la partie XX.1 du Code criminel est con�ue pour prendre des mesures qui prot�geront la s�curit� du public avant que des actes de violence surviennent, et non (comme c'est le cas habituellement) pour punir le contrevenant apr�s coup.

La Cour d'appel a commis une erreur de droit en rejetant la nouvelle preuve. La d�cision rendue par la commission d'examen est susceptible d'appel sur le fondement de la transcription des t�moignages et, selon le par. 672.73(1) du Code criminel, des "autres �l�ments de preuve dont la cour d'appel accepte la pr�sentation lorsqu'elle estime que la justice l'exige". L'expression "lorsque la justice l'exige" tire son sens du contexte dans lequel on cherche � l'appliquer et "la justice" s'entend non seulement de la justice � l'�gard du d�tenu non responsable criminellement, dont la libert� est en jeu, mais �galement de la justice � l'�gard du public, dont on cherche � assurer la protection. La preuve offerte (incluant des actes de violence physique en 2000 et un menace de mort r�cente) �tait tr�s pertinente. Elle concernait directement la r�serve qu'avait la Cour d'appel quant � l'insuffisance de la preuve de la propension continue de l'intim� � la violence et, si elle �tait digne de foi, elle aurait d� �tre admise comme portant sur une question d�cisive. On ne devrait accorder la lib�ration inconditionnelle qu'apr�s avoir examin� tous les �l�ments de preuve fiables connus autant au moment de l'audition par la Commission qu'au moment du contr�le en appel, le cas �ch�ant. La nouvelle preuve a donc �t� admise comme faisant partie du dossier dans le pourvoi.

La juge Arbour (dissidente) : La norme de contr�le applicable � la d�cision d'une commission d'examen est celle de la d�cision raisonnable simpliciter et, en l'esp�ce, la Cour d'appel a conclu � juste titre que la d�cision de la Commission �tait d�raisonnable.

Premi�rement, la Commission a tir� une conclusion d�raisonnable sur la dangerosit� de l'intim�. Pour d�terminer si l'accus� repr�sente un risque important pour la s�curit� du public, la Commission doit prendre en compte tous les facteurs �num�r�s � l'art. 672.54 du Code. Si l'�tat mental de l'accus� est tel qu'il ne souffre d�sormais plus de troubles mentaux, on ne devrait pas confondre son �tat mental avec sa propension � commettre des crimes et, � cet �gard, l'accus� devrait, comme toute autre personne, subir les sanctions impos�es en mati�re p�nale. Le r�gime de d�tention pour cause de troubles mentaux vise � pr�venir la r�p�tition des actes dangereux auxquels la personne atteinte risque de se livrer et dont elle ne serait pas tenue criminellement responsable. La Cour d'appel a donc correctement conclu que la Commission avait puni � tort l'intim� pour avoir r�ussi � tromper le personnel de l'h�pital quant � sa consommation de drogue. Fonder la d�tention de l'intim� sous le r�gime de la non-responsabilit� criminelle sur ses probl�mes persistants d'abus d'alcool et d'autres drogues �quivaut � lui imposer un fardeau tel qu'on le prive � tout jamais de la possibilit� d'en sortir, malgr� l'absence prolong�e de tout comportement violent de sa part. L'�valuation par la Commission du risque pos� par l'intim� reposait enti�rement sur des hypoth�ses et n'�tait pas �tay�e par un examen ad�quat du dossier.

Deuxi�mement, au vu des faits du dossier, il �tait d�raisonnable pour la Commission d'examen de conclure que la d�tention s'av�rait la d�cision la moins s�v�re possible dans les circonstances parce qu'elle permettait � l'intim� de jouir d'autant de libert� que la s�curit� du public le permet. M�me si l'intim� repr�sentait une menace pour la collectivit� suffisamment importante pour que sa lib�ration inconditionnelle soit exclue, la Commission �tait tenue d'examiner chacun des quatre facteurs �nonc�s � l'art. 672.54 pour d�cider si une lib�ration conditionnelle ou une ordonnance de garde �tait indiqu�e.

Il n'y avait pas lieu de toucher � l'exercice par la Cour d'appel de son pouvoir discr�tionnaire dans l'appr�ciation de la nouvelle preuve dont elle a �t� saisie. Le par. 672.73(1) du Code autorise la Cour d'appel � admettre tout �l�ment de preuve "lorsqu'elle estime que la justice l'exige". Lorsqu'une cour d'appel est d'avis qu'un accus� non responsable criminellement aurait d� se voir accorder une lib�ration inconditionnelle au terme de l'audition de la Commission, la nouvelle preuve devrait �tablir de fa�on quasi incontestable que la lib�ration inconditionnelle serait inopportune pour que la cour d'appel d�cide de ne pas l'ordonner. De plus, il n'appara�t pas clairement que la lib�ration inconditionnelle d'un d�tenu non responsable criminellement met un terme � la capacit� de l'�tat de surveiller et de contr�ler l'�tat mental de l'intim�. En fait, le paragraphe 672.82(1) du Code pr�voit que la commission peut tenir une audition discr�tionnaire en tout temps.

Jurisprudence

Cit�e par le juge Binnie

Distinction d'avec l'arr�t : Starson c. Swayze, 2003 CSC 32; arr�ts mentionn�s : Winko c. Colombie-Britannique (Forensic Psychiatric Institute), [1999] 2 R.C.S. 625; R. c. Swain, [1991] 1 R.C.S. 933; U.E.S., local 298 c. Bibeault, [1988] 2 R.C.S. 1048; Moreau-B�rub� c. Nouveau-Brunswick (Conseil de la magistrature), [2002] 1 R.C.S. 249, 2002 CSC 11; Canada (Directeur des enqu�tes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748; Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, 2003 CSC 20; Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, 2003 CSC 19; R. c. Yebes, [1987] 2 R.C.S. 168; R. c. Biniaris, [2000] 1 R.C.S. 381; Peckham c. Ontario (Attorney-General) (1994), 93 C.C.C. (3d) 443; Beauchamp c. Penetanguishene Mental Health Centre (Administrator) (1999), 138 C.C.C. (3d) 172; Penetanguishene Mental Health Centre c. Ontario (Attorney General) (1999), 131 C.C.C. (3d) 473, autorisation de pourvoi refus�e, sub nom. Clement c. Attorney General for Ontario, [1999] 1 R.C.S. vi; Palmer c. La Reine, [1980], 1 R.C.S. 759; R. c. Stolar, [1988] 1 R.C.S. 480; Davidson c. British Columbia (Attorney-General) (1993), 87 C.C.C. (3d) 269; R. c. Warsing, [1998] 3 R.C.S. 579; Ares c. Venner, [1970] R.C.S. 608; R. c. Khan, [1990] 2 R.C.S. 531; R. c. L�vesque, [2000] 2 R.C.S. 487; R. c. Sheppard, [2002] 1 R.C.S. 869, 2002 CSC 26.

Cit�e par le juge Arbour

R. c. Biniaris, [2000] 1 R.C.S. 381; R. c. Yebes, [1987] 2 R.C.S. 168; Winko c. Colombie-Britannique (Forensic Psychiatric Institute), [1999] 2 R.C.S. 625; Palmer c. La Reine, [1980], 1 R.C.S. 759; R. c. Stolar, [1988] 1 R.C.S. 480; R. c. Morin (1995), 37 C.R. (4th) 395.

Lois et r�glements cit�s

Code

criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46, art. 16(1) [abr. & rempl. 1991, ch. 43, art. 2], 672.34 [aj. idem, art. 4], 672.38(1) [idem], 672.39 [idem], 672.4(1) [idem], 672.43 [idem], 672.51(1) [idem], (2) [idem], 672.54 [idem]., 672.73(1) [idem], 672.78(1) [idem], (2) [idem], (3)(a) [idem; rempl. 1997, ch. 18, art. 89], b) [aj. 1991, ch. 43, art. 4], c) [idem], 672.81(1) [idem], 672.82 [idem], 683(1), 686(1)a) [mod. idem, art. 9, ann., art. 8].

Loi sur les enqu�tes, L.R.C. 1985, ch. I-11, art. 4, 5.

Loi de 1996 sur le consentement aux soins de sant�, L.O. 1996, ch. 2, ann. A, art. 80(9).

POURVOI contre un arr�t de la Cour d'appel de l'Ontario (2001), 54 O.R. (3d) 257, 145 O.A.C. 142, 155 C.C.C. (3d) 82, 42 C.R. (5th) 362, [2001] O.J. No. 1710 (QL), accueillant un appel contre une d�cision d'une commission d'examen. Pourvoi accueilli, la juge Arbour est dissidente.

Riun Shandler, pour l'appelante.

Brian Snell, pour l'intim�.

Procureur de l'appelante : Le procureur g�n�ral de l'Ontario, Toronto.

Procureurs de l'intim� : Pinkofskys, Toronto.

Version fran�aise du jugement du juge en chef McLachlin et des juges Gonthier, Iacobucci, Major, Bastarache, Binnie, LeBel et Deschamps rendu par

1 LE JUGE BINNIE :� Les changements apport�s en 1991 au Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46 (C.cr.), ont instaur� un nouveau syst�me de r�vision des d�cisions prises � l'�gard des personnes accus�es d'une infraction criminelle qui, comme l'intim�, ont �t� d�clar�es non responsables criminellement pour cause de troubles mentaux. Dans le cas de l'intim�, il s'agissait d'une infraction de meurtre au deuxi�me degr� qu'il a commise en 1978 dans un �tat de psychose provoqu� par la consommation de drogue. Le 17 mai 2000, ayant conclu au terme d'une audition compl�te que l'intim� repr�sentait toujours un danger important pour la s�curit� du public, la Commission ontarienne d'examen (la "Commission") a ordonn� le maintien de sa d�tention au Kingston Psychiatric Hospital ("KPH"). Devant la Cour d'appel, le minist�re public a voulu renforcer la d�cision de la Commission en produisant de nouveaux �l�ments de preuve par affidavit all�guant que, depuis l'audition tenue devant la Commission, l'intim� avait frapp� un patient et menac� d'en tuer un autre, en plus d'avoir �t� trouv� en possession de drogues interdites. Refusant d'admettre cette nouvelle preuve, la Cour d'appel a r�vis� l'ordonnance de la Commission au regard de la preuve disponible lors de l'audition initiale, accueilli l'appel, annul� l'ordonnance de la Commission jug�e d�raisonnable et ordonn� la lib�ration inconditionnelle de l'intim�.

2 Je suis d'avis d'accueillir le pourvoi. En faisant montre de la retenue qui s'impose � l'�gard de son expertise sur ces questions, j'estime que la Commission n'a pas rendu une d�cision d�raisonnable compte tenu du dossier dont elle disposait. En outre, et cela dit en toute d�f�rence, la Cour d'appel a commis une erreur de droit en rejetant la nouvelle preuve sans motifs � l'appui. La preuve du comportement violent de l'intim� en 2000 �tait pertinente, car elle touchait au coeur de la d�cision de la cour selon laquelle la d�tention de l'intim�, au motif qu'il repr�sente un risque important pour la s�curit� du public, n'�tait plus n�cessaire. La nouvelle preuve confirmait en partie le fondement factuel de l'ordonnance rendue par la Commission le 17 mai 2000. La proc�dure �tablie par la loi en ce qui concerne les personnes d�clar�es non responsables criminellement pour cause de troubles mentaux est de nature inquisitoire et non contradictoire. Une ordonnance de lib�ration inconditionnelle devrait s'appuyer sur les meilleures donn�es connues, y compris, dans les cas appropri�s, sur la nouvelle preuve offerte � la cour d'appel qui est post�rieure � l'audition initiale tenue par la Commission.

3 L'issue du pr�sent pourvoi aura une incidence limit�e sur l'intim�. Nous examinons aujourd'hui des �v�nements survenus il y a trois ans. Or, l'intim� a droit � une r�vision ind�pendante de son ordonnance de d�tention par des experts au moins une fois tous les 12 mois et, plus t�t, "en tout temps", � la discr�tion de la Commission (par. 672.82(1)). Prescrites par le Code criminel, ces r�visions annuelles se tiendront jusqu'� ce que l'intim� soit lib�r� inconditionnellement. Celui-ci a ainsi l'assurance que toute nouvelle ordonnance relative au maintien de sa d�tention ou � sa lib�ration �ventuelle sera fond�e sur des renseignements et des �valuations � jour. Cette proc�dure garantit l'�quit� du processus tant envers l'intim� qu'envers le public.

I. Les faits

4 Le 10 octobre 1978, l'intim� qui devait r�pondre � une accusation de meurtre au deuxi�me degr� a �t� d�clar� non coupable pour cause de troubles mentaux. Les circonstances entourant le meurtre (l'"infraction initiale") ont �t� consign�es comme suit dans le rapport de l'H�pital psychiatrique de North Bay, dat� d'octobre 1990 :

	[TRADUCTION] [L'intim�] vivait avec la victime [un homme] �g� de 22 ans originaire de la r�gion de Chatham. Ils vivaient ensemble depuis pr�s de trois mois. L'infraction a �t� perp�tr�e le matin, mais [l'intim�] a dit ne pas se rappeler grand chose. Il se souvient qu'il avait des id�es parano�des au cours des semaines pr�c�dant l'infraction et qu'une chanson lui trottait dans la t�te.
	Il ne se souvient pas des paroles de la chanson. La veille de l'infraction, il s'est couch� et s'est souvenu qu'il avait une pomme dop�e aux MDA. Le lendemain matin, [l'intim�] et un autre homme ont partag� cette pomme. [L'intim�] affirme qu'il avait peur et qu'il avait des id�es parano�des depuis un certain temps, sans en �tre tout � fait conscient. Cependant, apr�s avoir mang� la pomme, il a eu peur de son ami et a cru que celui-ci �tait impliqu� dans le meurtre de son grand-p�re, pourtant d�c�d� de causes naturelles. [L'intim�] se rappelle avoir frapp� l'homme avec un b�ton ou autre chose du genre. [L'intim�] avait �galement une arme � feu. Apr�s l'infraction, il s'est arr�t� et il est demeur� sur les lieux jusqu'� l'arriv�e des policiers. L'homme est d�c�d� peu de temps apr�s des suites de ses blessures. [L'intim�] a �t� accus� de meurtre.

5 Avant le meurtre survenu en 1978, l'intim� avait d�j� un casier judiciaire pour des infractions d'introduction par effraction, d'entrave au travail d'un policier, de trafic de stup�fiants, de possession de stup�fiants et de possession de biens vol�s.

6 Apr�s une p�riode de d�tention dans diverses institutions de soins de sant� mentale, l'intim� a �t� progressivement remis en libert� dans la collectivit� jusqu'en 1987, lorsqu'il a �t� arr�t� pour possession d'une arme prohib�e, introduction par effraction avec l'intention de commettre un acte criminel et possession de biens criminellement obtenus. Le 15 juin 1988, on l'a d�clar� coupable de ces trois chefs. Apr�s avoir purg� sa peine, l'intim� est retourn� � l'H�pital psychiatrique de North Bay. En 1989, il s'est disput� avec le personnel de l'h�pital � propos des privil�ges qui lui �taient accord�s et, selon le rapport de l'h�pital, il a perdu son sang-froid et a frapp� une porti�re de voiture si fort qu'il s'est fractur� la main, ce qui a n�cessit� qu'on lui fasse un pl�tre. L'intim� aurait affirm� : [TRADUCTION] "[c]'�tait la porte ou la m�choire de Brad, t'sais, fallait que je frappe quelque chose". Plus tard, pendant qu'il vivait dans la collectivit� en janvier 1990, l'intim� a inflig� une grave fracture de la m�choire � un homme avec une baguette de billard au cours d'une altercation alors qu'il �tait sous l'influence de l'alcool. Le 7 juin 1990, l'intim� a �t� d�clar� coupable de voies de fait causant des l�sions corporelles, infraction pour laquelle il s'est vu imposer une peine d'emprisonnement de 14 mois.

7 On a ensuite tent� de nouveau de le remettre progressivement en libert� dans la collectivit�, mais ses probl�mes d'abus d'alcool et d'autres drogues ont refait surface et il a continu� � d�montrer une certaine propension � la violence. En 1991, par exemple, l'intim� a �t� admis � l'unit� de garde en milieu ferm� du KPH. L�, il a eu ce qu'on a appel� des "comportements violents" alors qu'il �tait sous l'influence de l'alcool. Dans le cadre d'une �valuation du risque men�e en 1992, le minist�re de la Sant� de l'Ontario a plac� l'intim� dans la cat�gorie des d�linquants violents dont on estimait le taux de r�cidive avec violence � 44 pour 100 dans les sept ans suivant leur lib�ration. En 1992, un rapport du KPH �tabli par le personnel m�dical signalait, parmi les facteurs de risque pr�sent�s par l'intim�, l'abus de drogues illicites ou d'alcool, ainsi que la violence � l'�gard des autres :

[TRADUCTION] Le pronostic [de l'intim�] �tait encore tr�s r�serv�, compte tenu de son manque d'introspection, de son peu d'�gard envers autrui et de son intol�rance face au syst�me. On pr�disait qu'une situation circonstancielle compromettrait vraisemblablement sa libert� tr�s t�t dans sa r�int�gration au sein de la collectivit�. [L'intim�] a des ant�c�dents d'infractions r�p�t�es, notamment en ce qui a trait � la violence sans provocation et � la consommation d'alcool et d'autres drogues, ainsi qu'une attitude cavali�re, ce pourquoi il constitue un risque s�rieux pour la collectivit�.

8 La Commission a n�anmoins d�cid�, en 1994, 1995 et 1996, de lib�rer l'intim� sous conditions. En 1997, le test d'urine de l'intim� a r�v�l� la pr�sence de cannabis, et le KPH a fait savoir � la Commission qu'il ne pouvait d�sormais plus �tre en faveur d'une ordonnance de lib�ration conditionnelle pour l'intim� en raison de son abus persistant d'alcool et d'autres drogues et du fait que l'h�pital avait besoin d'une certaine marge de manoeuvre pour [TRADUCTION] "r�agir rapidement � l'aggravation connue du risque" :

[TRADUCTION] [S]i l'h�pital ne peut demander l'hospitalisation ou d'importants changements dans la surveillance de [l'intim�], la collectivit� court un risque. La collectivit� ne comprendrait pas pourquoi le KPH n'est pas en mesure de r�agir rapidement � l'aggravation connue du risque. Cette situation se r�p�tera fort probablement � maintes reprises. Le r�le de l'h�pital devrait �tre de g�rer la situation sans tarder par des mesures qui soient compatibles avec les besoins de [l'intim�] sur le plan de sa r�adaptation � long terme et qui ne compromettent pas la s�curit� du public. L'h�pital ne voit pas l'utilit� d'hospitaliser chaque fois [l'intim�] pendant plusieurs mois jusqu'� ce que la Commission lui ait fait conna�tre son bon plaisir. En fait, l'arrangement administratif actuel - l'ordonnance de lib�ration conditionnelle - produit des effets qui vont � l'encontre des besoins de [l'intim�] sur le plan de sa r�adaptation et ne prot�ge en rien la s�curit� du public. [Je souligne.]

[...]

[...] Il existera toujours un risque que [l'intim�] consomme de l'alcool et d'autres drogues et adopte des comportements antisociaux connexes. Le risque atteindra un niveau inacceptable lorsque cela se produira. L'h�pital doit �tre en mesure de faire face � cette situation gr�ce au pouvoir discr�tionnaire que lui conf�re une ordonnance de d�tention. [Je souligne.]

9 Les d�cisions rendues par la Commission en 1997, 1998 et 1999 pr�voyaient que l'intim� serait d�tenu au KPH mais qu'il vivrait � Kingston, pourvu, encore une fois, qu'il s'abstienne de consommer de l'alcool et d'autres drogues, sauf � des fins m�dicales. En mars 1999, l'h�pital a affirm� :

L'�quipe estime que [l'intim�] continue de repr�senter un risque pour la s�curit� du public.

En 2000, on a constat� qu'il continuait � consommer de la coca�ne, ainsi que je le d�cris plus loin.

10 C'est au cours de cette p�riode que l'intim� a commenc� � vivre en union de fait. Lui et sa conjointe ont eu un enfant, auquel l'intim� est d�vou�. Le couple a fini par se s�parer et l'intim� a pris l'enfant en charge pendant un certain temps. Il ressort manifestement de son t�moignage que l'impossibilit� pour lui de sortir de l'h�pital et de prendre soin de son fils le pr�occupe �norm�ment. Le stress li� � la monoparentalit� et ses s�rieuses difficult�s financi�res ont toutefois eu des cons�quences n�fastes pour lui. En 1999, l'intim� a �t� d�clar� coupable de conduite avec facult�s affaiblies et condamn� � une peine d'emprisonnement. L'enfant est all� vivre avec sa m�re, mais la Soci�t� d'aide � l'enfance l'a pris en charge le 30 septembre 1999.

11 La conjointe de fait de l'intim� et la fille de celle-ci, issue d'une autre union, ont inform� les autorit�s de l'h�pital que l'intim� "d�jouait" les tests de d�pistage de drogues depuis des ann�es en substituant les �chantillons d'urine d'autres personnes aux siens. Lorsqu'on lui a fait subir un nouveau test sous surveillance �troite le 25 janvier 2000, le test s'est r�v�l� positif quant � la pr�sence de coca�ne et de cannabis. L'intim� a ensuite avou� que, mis � part une p�riode d'environ 18 mois pr�c�dant la naissance de son fils, il n'avait jamais renonc� � ses habitudes de consommation de drogue et il n'a apparemment pas l'intention d'y renoncer.

II.		Historique des proc�dures
A.		Commission ontarienne d'examen (17 mai 2000)

12 Ayant examin� les circonstances et les faits relat�s plus haut, la Commission a not� qu'� la suite du r�sultat positif de son test de d�pistage de drogue, l'intim� reconna�t maintenant volontiers consommer r�guli�rement de la drogue depuis de nombreuses ann�es (sauf pour ce qui est de la coca�ne). Son avocat a contest� la pr�tention de l'h�pital que, [TRADUCTION] "pris ensemble, la drogue, l'alcool et les sources de stress dans [la] vie [de son client]" formaient "une combinaison fatale" qui cr�ait "un risque important" :

[TRADUCTION] Je dis simplement que ces facteurs sont pr�sents dans sa vie depuis une d�cennie et que rien n'indique qu'il soit pass� � l'acte, qu'il ait manifest� un comportement violent ou abusif - ou que la maladie mentale dont il souffrait lors de la perp�tration de l'infraction initiale soit r�apparue.

13 La Commission a conclu que l'intim� [TRADUCTION] "est actuellement en r�mission de sa psychose provoqu�e par la drogue. Toutefois, il souffre encore d'un tr�s grave trouble de la personnalit� antisociale exacerb� par l'abus d'alcool et d'autres drogues." Selon le t�moignage du m�decin traitant de l'intim� au KPH, la coca�ne produit un effet comparable � celui des amph�tamines qui ont provoqu� l'�tat de psychose dans lequel l'intim� a commis le meurtre en 1978. Selon la Commission, il ressort de la preuve que l'intim� [TRADUCTION] "continue de s'exposer aux �l�ments m�mes qui l'ont plong� dans sa psychose provoqu�e par la drogue et d�sinhib� au point o� il a perdu la ma�trise de ses actes" (je souligne).

14 La Commission a pris note de l'avis de l'administrateur de l'h�pital, selon lequel l'intim� [TRADUCTION] "repr�sente un risque important pour la s�curit� du public. Il a d�montr� que, m�me sous surveillance �troite, il adopte des comportements qui pourraient exposer le public � un danger. Ce qu'il y a de plus inqui�tant, c'est la pr�sence de coca�ne, de par ses effets semblables aux amph�tamines [que l'intim�] avait prises lorsqu'il a commis l'infraction initiale et qui l'ont plong� dans un �tat de parano�a provoqu� par la drogue."

15 La Commission a donc conclu que, [TRADUCTION] "compte tenu de la n�cessit� de prot�ger le public contre les personnes dangereuses[,] de l'�tat mental de [l'intim�] et de ses besoins, notamment de la n�cessit� de sa r�insertion sociale, la Commission estime � l'unanimit� que la d�cision la moins s�v�re et la moins privative de libert�" serait la d�tention continue de l'intim� au KPH, qui pourrait l'autoriser � s'absenter pour des raisons humanitaires, lui accorder des privil�ges dans les locaux et sur le terrain de l'h�pital et le r�ins�rer dans la collectivit�, le tout sous escorte du personnel hospitalier. En plus de s'abstenir totalement de prendre de l'alcool et des drogues, autres que des m�dicaments vendus sous ordonnance, l'intim� devait soumettre un �chantillon d'haleine ou d'urine, ou les deux, pour fins de d�pistage.

B. La demande de production d'une nouvelle preuve

16 L'audience de la Commission s'est d�roul�e en mars 2000. Lorsque la Cour d'appel a �t� saisie de l'affaire, le minist�re public a voulu faire admettre comme nouvelle preuve le rapport qu'avait pr�par� le KPH en vue de l'audition subs�quente de l'intim� devant la Commission, soit en janvier 2001, rapport auquel �taient joints divers dossiers d'h�pital attestant que l'intim� avait [TRADUCTION] "menac� de s'en prendre � plusieurs reprises � d'autres patients" en 2000. Le 29 mars 2000, l'intim� a �t� plac� [TRADUCTION] "en isolement parce que son comportement avait empir� au point de devenir agressif et �tait mena�ant en soi ". Le dossier r�v�le que, le 10 avril 2000, l'intim� a "tourment�" un autre patient pour finalement lui demander : [TRADUCTION] "Vas-tu me tuer cette nuit?". En septembre 2000, des accusations ont �t� port�es contre l'intim� apr�s qu'on eut trouv� des accessoires servant � la consommation de drogues. Au cours d'une analyse d'urine administr�e le m�me mois, l'intim� aurait dit � une infirmi�re : [TRADUCTION] "J'ai le go�t de fracasser le cr�ne de quelqu'un, comme j'en ai envie depuis dix ans." Selon le dossier, le 26 septembre 2000, il aurait cri� � un autre patient qui, semble-t-il, se trouvait dans sa chambre � la recherche d'une montre vol�e : [TRADUCTION] "Maudit enfant de chienne. Si tu viens encore une fois dans ma chambre, je te tue. Tu vois ces maudites cam�ras? Ben, je m'en fous compl�tement. Je vais te tuer. �a fait 20 ans que j'ai pas tu� quelqu'un, mais je vais recommencer." Le 12 d�cembre 2000, l'intim� s'est battu avec un autre patient et lui a assen� un coup au nez. Plusieurs autres patients ont �t� t�moins de cet incident.

C. Cour d'appel (2001), 54 O.R. (3d) 257

17 La Cour d'appel (les juges Catzman, Weiler et Rosenberg) a conclu que la d�cision de la Commission �tait d�raisonnable et qu'elle n'�tait pas �tay�e par les �l�ments de preuve produits � l'audition initiale.

18 Elle a refus� d'admettre la nouvelle preuve sans toutefois motiver son rejet.

19 La cour a examin� les dispositions pertinentes du Code criminel, y compris "la n�cessit� de prot�ger le public face aux personnes dangereuses" (art. 672.54), en prenant soin de souligner qu'il incombe au minist�re public de d�montrer que l'intim� repr�sente "un risque important pour la s�curit� du public" (al. 672.54a)). Elle a mentionn� l'arr�t Winko c. Colombie-Britannique (Forensic Psychiatric Institute), [1999] 2 R.C.S. 625. La cour a not� que le KPH ne consid�rait pas que l'intim� repr�sentait un risque important pour la s�curit� du public entre 1994, lorsqu'il a recommand� sa lib�ration inconditionnelle, et 1999. La cour s'est dite d'avis que la Commission avait � tort mis l'accent sur la pr�vention de la consommation excessive d'alcool et de drogues illicites par l'intim� plut�t que sur la protection du public. Elle est arriv�e � la conclusion que la preuve dont disposait la Commission ne permettait pas d'�tablir que l'intim� repr�sentait un risque important pour la s�curit� du public, et ce, m�me lorsqu'il consommait de la drogue. La cour a donc ordonn� la lib�ration inconditionnelle de l'intim�.

III. Dispositions l�gislatives pertinentes.

20 Les dispositions pertinentes du Code criminel sont jointes dans l'appendice A.

IV. Analyse

21 Quand y a-t-il lieu d'ordonner la lib�ration inconditionnelle et la r�int�gration dans la collectivit� sans aucune restriction d'un individu qui est d�clar� non responsable criminellement d'un meurtre parce qu'il souffre de troubles mentaux li�s � l'abus d'alcool et d'autres drogues et qui refuse de renoncer � ses habitudes de consommation? L'individu en question dans le pr�sent pourvoi pr�tend qu'il avait droit � une lib�ration inconditionnelle au plus tard en mai 1998 et, comme je l'ai soulign�, la Cour d'appel de l'Ontario lui a donn� raison.

22 L'individu dont on d�termine qu'il a commis une omission ou un acte de nature criminelle alors qu'il �tait atteint de troubles mentaux n'est pas acquitt�. La cour doit plut�t prononcer � son �gard un verdict de "non-responsabilit� criminelle pour cause de troubles mentaux" si elle conclut qu'au moment de l'infraction, ses troubles mentaux ont nui � sa capacit� de juger de la nature et de la qualit� de son acte ou de son omission, ou de savoir que cet acte ou cette omission �tait mauvais (C.cr., art. 16(1) et 672.34).

23 Il n'existe aucune pr�somption selon laquelle un individu non responsable criminellement repr�sente un danger pour la s�curit� du public : Winko, pr�cit�, par. 46. Au contraire, le Code criminel prescrit la lib�ration inconditionnelle des personnes d�clar�es non responsables criminellement, sauf si le tribunal ou la commission d'examen peut conclure qu'elles posent un risque important pour la s�curit� du public. M�me lorsque ce risque est �tabli, la d�cision doit �tre "la moins s�v�re et la moins privative de libert�" compte tenu du niveau de risque, allant de la " d�tention de l'accus� dans un h�pital" � sa lib�ration "sous r�serve des modalit�s que le tribunal ou la commission juge indiqu�es" (C.cr., art. 672.54).

24 La d�cision rendue par la commission d'examen est susceptible d'appel sur le fondement de la "transcription d�pos�e aupr�s de la cour d'appel et [des] autres �l�ments de preuve dont la cour d'appel accepte la pr�sentation lorsqu'elle estime que la justice l'exige" (C.cr., par. 672.73(1)).

25 Pour la validit� constitutionnelle de cet arrangement que pr�voit la loi, il est de la plus haute importance que l'individu - qui par d�finition ne pouvait juger de la nature et de la qualit� de l'acte ou savoir qu'il �tait mauvais au moment de l'infraction - ne soit intern� que pour prot�ger le public, et non pour le punir (Winko, pr�cit�, par. 41 et 71, et R. c. Swain, [1991] 1 R.C.S. 933). En l'esp�ce, l'intim� pr�tend qu'on le punit non seulement pour l'infraction initiale, mais �galement pour ses habitudes de consommation de drogue et pour son refus de collaborer avec les autorit�s de l'h�pital � cet �gard de 1978 � 2000.

A. La justification du maintien de l'internement

26 Apr�s la d�livrance d'une ordonnance de d�tention, la responsabilit� de v�rifier si l'individu non responsable criminellement repr�sente toujours un risque important pour la s�curit� du public incombe � la Commission qui doit tenir une nouvelle audition au moins une fois tous les 12 mois afin de revoir le statut des personnes qui se trouvent dans cette situation [C.cr., par. 672.81(1)].

27 La Commission doit �tre convaincue qu'au moment de l'audition, la preuve �tablit que l'individu non responsable criminellement repr�sente un tel risque. "Si, en bout de ligne, le tribunal ou la commission d'examen ne peut tirer une telle conclusion, aucun fondement l�gal ne justifie la d�tention de [la personne] non responsable criminellement, et [cette derni�re] doit �tre lib�r�[e]" (Winko, pr�cit�, par. 51).

28 La difficult�, naturellement, tient au fait que la Commission est forc�ment tenue de proc�der � son �valuation � titre d'expert � partir de donn�es limit�es. En l'occurrence, l'intim� est sous la surveillance de l'�tat � divers degr�s depuis plus de vingt ans. On fait n�cessairement intervenir un �l�ment de pr�diction lorsqu'on cherche � savoir quelle serait la r�action de l'intim� si, du fait de sa lib�ration inconditionnelle, il �tait soustrait � la surveillance de l'�tat. La Commission doit centrer son attention sur l'�tat mental actuel de l'intim�, mais la justesse de son �valuation en pratique sera dans une certaine mesure tributaire des �v�nements futurs. Selon la Commission les principaux facteurs qui viennent compliquer les choses en l'esp�ce sont les ant�c�dents de violence de l'intim�, son probl�me persistant de toxicomanie, le lien entre sa consommation de drogues dures et le meurtre commis en 1978, ainsi que son apparente r�ticence � renoncer � ses habitudes de consommation de drogue.

B. L'expertise de la Commission d'examen

29 Pour s'acquitter de cette difficile �valuation des troubles mentaux et des risques pour la s�curit� qui y sont associ�s, la Commission compte des experts parmi ses membres et dispose de vastes pouvoirs d'enqu�te. Au moins un des cinq membres dont la Commission est minimalement constitu�e doit �tre autoris� � exercer la psychiatrie et son pr�sident doit �tre un juge nomm� par le gouvernement f�d�ral ou une personne qui remplit les conditions de nomination � un tel poste. Si la Commission ne compte qu'un psychiatre, au moins un autre de ses membres doit �tre une personne autoris�e � exercer la m�decine ou la profession de psychologue et "dont la formation et l'exp�rience rel�vent de la sant� mentale" (C.cr., art. 672.39 et 672.4). Le pr�sident de la Commission est investi des pouvoirs pr�vus aux articles 4 et 5 de la Loi sur les enqu�tes, L.R.C. 1985, ch. I-11, ainsi que d'une large comp�tence pour examiner les "renseignements d�cisionnels" qui peuvent ne pas �tre conformes � tous �gards aux strictes r�gles de preuve (C.cr., art. 672.43 et 672.51).

30 La question de savoir si, � cause de son �tat mental, l'intim� repr�sente un risque important pour la s�curit� du public fait manifestement appel � une grande expertise.

C. La norme de contr�le

31 L'appelante a soumis une analyse approfondie des d�cisions de notre Cour en droit administratif, de U.E.S., Local 298 c. Bibeault, [1988] 2 R.C.S. 1048, p. 1087, � Moreau-B�rub� c. Nouveau-Brunswick (Conseil de la magistrature), [2002] 1 R.C.S. 249, 2002 CSC 11, relativement � l'application de la "m�thode fonctionnelle et pragmatique" pour d�terminer la norme de contr�le applicable. Cependant, le l�gislateur a pris la peine d'�noncer dans le Code criminel la norme pr�cise de contr�le judiciaire qui s'applique � ces commissions d'examen, � savoir que la cour ne peut annuler une ordonnance rendue par la commission d'examen que si elle est d'avis que, selon le cas :

a)		la d�cision est d�raisonnable ou ne peut pas s'appuyer sur la preuve;
b)		il s'agit d'une erreur de droit [sauf si aucun tort important ou aucune erreur judiciaire grave ne s'est produit];

c) il y a eu erreur judiciaire. [C.cr., art. 672.78]

32 Il ne faut pas perdre de vue que, [TRADUCTION] "[d]ans une large mesure, l'examen judiciaire d'un acte administratif est une division sp�cialis�e de l'interpr�tation des lois" (soulignement omis) : Bibeault, p. 1087. Si le l�gislateur a r�v�l� son intention dans le libell� explicite de l'art. 672.78 C.cr., c'est cette norme de contr�le qu'il convient d'appliquer en l'absence de contestation constitutionnelle.

33 Le premier volet du crit�re correspond � ce que les tribunaux appellent la norme de contr�le de la d�cision raisonnable simpliciter, c'est-�-dire que la cour d'appel devrait se demander si l'�valuation du risque et l'ordonnance de la Commission �taient d�raisonnables en ce sens qu'elles n'�taient �tay�es par aucun motif capable de r�sister � un examen assez pouss� : Canada (Directeur des enqu�tes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748, par. 56, Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, 2003 CSC 20, et Dr Q c. The College of Physicians and Surgeons of British Columbia, 2003 CSC 19. En r�gle g�n�rale, la cour devrait s'abstenir d'intervenir si la d�cision de la Commission est telle que les membres de la Commission ayant une bonne connaissance des faits et une perception juste du droit applicable pourraient raisonnablement se trouver en d�saccord.

34 Citant les arr�ts R. c. Yebes, [1987] 2 R.C.S. 168, et R. c. Biniaris, [2000] 1 R.C.S. 381, le minist�re public nous demande d'appliquer le crit�re du "verdict d�raisonnable" en mati�re criminelle. Il y a un parall�le � tracer entre le libell� de l'art. 672.78 C.cr., qui traite de la r�vision en appel d'une ordonnance de non-responsabilit� criminelle, et celui de l'art. 686 C.cr. qui concerne la r�vision en appel des verdicts en mati�re criminelle. Un arr�t appuie cette proposition : Peckham c. Ontario (Attorney General) (1994), 93 C.C.C. (3d) 443 (C.A. Ont.), p. 445. Cela dit, en toute d�f�rence, il importe de garder � l'esprit le contexte diff�rent dans lequel s'inscrivent ces dispositions, malgr� leur libell� similaire. Une ordonnance de non-responsabilit� criminelle n'a pas un caract�re punitif : Winko, pr�cit�, par. 41 et 71. Elle �mane d'un processus de nature inquisitoire, et non contradictoire, qui se tient devant une commission administrative plut�t qu'un tribunal. Dans la mesure o� le minist�re public tente d'�lever le seuil du contr�le judiciaire au-del� de la d�cision raisonnable simpliciter, je crois qu'il faut rejeter ses pr�tentions. Une ordonnance de non-responsabilit� criminelle doit �tre r�vis�e sur le fondement des principes du droit administratif. Il faut alors recourir � la jurisprudence en mati�re de contr�le judiciaire au regard de la norme de la d�cision raisonnable simpliciter, examin�e r�cemment dans les arr�ts Dr Q., pr�cit�, par. 39, et Ryan, pr�cit�, par. 47.

35 L'appelante fait ensuite valoir que, malgr� son acceptation sur le plan conceptuel du crit�re de la d�cision raisonnable simpliciter, la Cour d'appel a substitu� en r�alit� son point de vue � celui de la Commission appliquant de ce fait la norme de contr�le qui appelle la moins grande retenue, soit celle de la d�cision correcte. Je ne suis pas de cet avis.

36 Au paragraphe 17 de ses motifs, la Cour d'appel a renvoy� � une d�cision qu'elle a rendue, Beauchamp c. Penetanguishene Mental Health Centre (Administrator) (1999), 138 C.C.C. (3d) 172, o� le juge Osborne (juge en chef adjoint de l'Ontario) a affirm� � la p. 180 que la r�vision d'une d�cision par le tribunal [TRADUCTION] " ne consiste pas � v�rifier si les conclusions tir�es dans la d�cision sont correctes" (je souligne). Voir aussi Penetanguishene Mental Health Centre c. Ontario (Attorney General) (1999), 131 C.C.C. (3d) 473, par. 8, autorisation de pourvoi � la C.S.C. refus�e, sub nom. Clement c. Attorney General for Ontario, [1999] 1 R.C.S. vi..

37 De plus, la cour a express�ment reconnu en l'esp�ce [TRADUCTION] "l'expertise m�dicale [de la Commission], ses connaissances sp�cialis�es et l'avantage qu'elle a eu d'observer les t�moins" (par. 18). Ces facteurs, et la cour l'a admis volontiers, appellent une certaine d�f�rence. Elle a n�anmoins d�cid� qu'elle se devait d'intervenir parce que, � son avis, la d�cision port�e en appel �tait d�raisonnable et ne pouvait �tre �tay�e par la preuve. Quoique la cour n'ait pas employ� l'expression "d�cision raisonnable simpliciter", j'estime qu'il se d�gage clairement de l'ensemble de la d�cision qu'elle a appliqu� cette norme de contr�le, et ce, � juste titre.

D. La d�cision de la Commission d'examen �tait-elle d�raisonnable?

38 La Cour d'appel a retenu la conclusion tir�e par la Commission selon laquelle l'intim� [TRADUCTION] "souffre encore d'un trouble de la personnalit� antisociale exacerb� par l'abus d'alcool et d'autres drogues" (par. 20). Une telle �valuation relevait de l'expertise de la Commission et la cour n'a d�cel� [TRADUCTION] "aucun �l�ment sur lequel la cour pourrait s'appuyer � bon droit pour la modifier" (par. 20).

39 L'�tat de psychose parano�de dans lequel le meurtre avait �t� commis en 1978, d�clench� par l'abus d'amph�tamines, avait apparemment disparu. Toutefois, bien que la preuve laisse entendre que l'intim� ne souffrait pas en 1999 de " troubles mentaux" (je souligne), condition essentielle au verdict initial de non-responsabilit� criminelle selon les art. 16 et 672.34 C.cr., la Commission est tenue par l'art. 672.54 de prendre en compte, pour rendre ses d�cisions subs�quentes, de " l'�tat mental" (je souligne) de la personne non responsable criminellement, notion qui a une port�e plus �tendue et qui, dans le cas de l'intim�, �tait assur�ment une consid�ration pertinente pour la Commission d'examen au printemps 2000. Pour reprendre les termes utilis�s par la juge McLachlin (maintenant Juge en chef) dans Winko, pr�cit�, au par. 40 :

La s�curit� du public ne peut �tre assur�e qu'en stabilisant l'�tat mental de l'accus� non responsable criminellement qui est dangereux.

40 La Cour d'appel a cependant conclu que la preuve [TRADUCTION] "ne permettait pas d'�tablir que l'appelant repr�sente un risque important pour la s�curit� du public, et ce, m�me lorsqu'il consomme de la drogue" (par. 29). Je reconnais tout � fait que la cour doit faire preuve de vigilance pour prot�ger la libert� des personnes d�tenues en vertu des dispositions relatives � la non-responsabilit� criminelle �dict�es dans le Code criminel, mais cette vigilance doit �tre temp�r�e par la reconnaissance de la difficult� inh�rente de l'objet de l'examen et de l'expertise des examinateurs m�dicaux. Voici ce que dit � ce sujet l'arr�t Winko, pr�cit�, au par. 61 :

Les cours d'appel qui examinent les d�cisions rendues par un tribunal ou une commission d'examen doivent avoir � l'esprit l'�tendue de ces enqu�tes ainsi que le fait que les tribunaux de juridiction inf�rieure connaissent bien la situation particuli�re de l'accus� non responsable criminellement, et la difficult� de d�terminer si la personne en cause repr�sente un "risque important" pour la s�curit� du public.

41 La Cour d'appel a retenu l'argument de l'intim� qui veut que la Commission d'examen ait, � tort, [TRADUCTION] "mis l'accent sur la pr�vention de la consommation excessive d'alcool et de drogues illicites par l'appelant plut�t que sur la protection du public. Elle a exerc� son pouvoir d�cisionnel � des fins punitives [...]" (par. 29). Mais, bien s�r, l'h�pital estimait que les drogues, la violence et l'�tat mental �taient inextricablement li�s. Par cons�quent, dans un rapport pr�sent� � la Commission le 25 mars 1999, l'h�pital a affirm� :

[TRADUCTION] L'�quipe estime que [l'intim�] repr�sente toujours un risque pour la s�curit� du public. Il y a consensus pour dire que, si son d�sir d'�lever son fils le motive � avoir un bon comportement, les restrictions d�coulant de l'existence de son ordonnance jouent elles aussi un r�le clef. L'�quipe est d'avis que, si ces mesures de contr�le disparaissaient, [l'intim�] pourrait fort bien �prouver des difficult�s, et peut-�tre faire une rechute en ce qui concerne sa maladie mentale. [Je souligne.]

42 La Cour d'appel de l'Ontario a soulign� que l'intim� avait b�n�fici� de lib�rations conditionnelles de1994 �1996. En 2000, la Commission devait �videmment examiner la situation de l'intim� telle qu'elle lui apparaissait en 2000. De 1994 � 1999, les autorit�s de l'h�pital ont �mis diverses recommandations en croyant � tort que l'intim� avait pris des mesures efficaces pour renoncer � l'abus d'alcool et d'autres drogues qui, � leur avis, avait �t� le catalyseur de ses actes de violence ant�rieurs. Elles ont modifi� leurs recommandations en 2000, parce que leur appr�ciation des faits importants avait chang�. En particulier, le test de d�pistage de coca�ne qu'a subi l'intim� s'est r�v�l� positif. Le m�decin traitant de l'intim� au KPH, le Dr Michael Chan, a rappel� aux membres de la Commission que l'intim� avait mang� une pomme dop�e aux m�thamph�tamines (une amph�tamine) avant de commettre le meurtre en 1978. Les amph�tamines et la coca�ne sont similaires sur le plan pharmacologique. Selon le Dr Chan, le refus ou l'incapacit� de l'intim� de renoncer � sa consommation de drogue - qui l'a amen� � commettre des actes de violence dans le pass� - posait donc un risque actuel important pour la s�curit� du public :

	[TRADUCTION]
	Q. Qu'y a-t-il � propos du test de d�pistage de coca�ne qui s'est av�r� positif le 25 janvier [2000] qui justifie la mention "plus inqui�tant" dans le rapport?
	R. Sur le plan pharmacologique, la coca�ne ressemble beaucoup aux amph�tamines et, en fait, les deux substances sont class�es - toutes deux comme des stimulants. Et on note une grande similarit� entre les deux substances dans leurs effets pharmacologiques � court et � long terme. De plus, si elles sont prises sur une longue p�riode, elles peuvent toutes deux cr�er un �tat psychotique parano�de.

...

	M. L. Steacy (membre de la Commission d'examen) : Et vous vous inqui�tez aujourd'hui de la possibilit� que cet homme commette un geste similaire ou qu'il r�cidive parce qu'il consomme de la drogue?
	Dr M. Chan : Oui.
	M. L. Steacy : Et c'est pourquoi vous affirmez devant la Commission qu'il repr�sente aujourd'hui un risque important pour la s�curit� du public?
	Dr M. Chan : Oui.

Toujours selon le t�moignage du Dr Chan, l'intim� ne voulait pas reconna�tre l'effet des drogues sur son �tat mental au moment de la perp�tration du meurtre initial, ce qui ne facilitait pas son traitement :

	[TRADUCTION]
	Q. ... [L'intim�] reconna�t-il que les drogues avaient quelque chose � voir avec le meurtre initial?
	R. E-uhm - s'il est bien dispos�, il peut admettre qu'il prenait des amph�tamines au moment de l'infraction. Mais, � un autre moment, il dirait que les amph�tamines n'ont rien � voir avec cela ... l'abus d'amph�tamines - drogues - �tait continu et a grandement contribu� � le plonger dans un �tat psychotique parano�de. [Dossier d'appel, p. 61-62]

43 La Commission disposait de nombreux �l�ments de preuve du comportement violent de l'intim� li� � son abus d'alcool et d'autres drogues, ou de la menace s�rieuse d'un recours � la violence. D'abord, il y avait le meurtre commis en 1978. En 1988, l'intim� a �t� d�clar� coupable de possession d'une arme prohib�e. En 1989, il s'est fractur� la main en frappant une porti�re de voiture dans un acc�s de rage : [TRADUCTION] "[c]'�tait la porte ou la m�choire de Brad, t'sais, fallait que je frappe quelque chose". Un an plus tard, il a effectivement fractur� la m�choire d'un homme avec une baguette de billard. En 1991, il a de nouveau manifest� des "comportements violents" et, par la suite, les rapports �manant du KPH ont continu� � faire �tat d'une propension � la violence. Mention a d�j� �t� faite des rapports sommaires de l'h�pital pour les ann�es 1991 � 1999. Mais ce qui est plus important, parce que ces donn�es sont plus r�centes, nous disposons des dossiers de soins infirmiers pour l'ann�e 2000 (faisant l'objet de la demande de production d'une nouvelle preuve), qui font �tat de la menace qu'il a faite � un autre patient le 26 septembre 2000 : [TRADUCTION] " Maudit enfant de chienne. Si tu viens encore une fois dans ma chambre, je te tue. Tu vois ces maudites cam�ras? Ben, je m'en fous compl�tement. Je vais te tuer. �a fait 20 ans que j'ai pas tu� quelqu'un, mais je vais recommencer." Ce n'est pas l� le langage que tient une personne qui ma�trise sa propension � la violence.

44 Dans ses motifs, la Commission n'a toutefois pas attach� autant d'importance aux incidents de menaces ou de violence qui ont pu survenir entre 1991 et 1999 qu'au fait qu'en 2000, l'intim� [TRADUCTION] "a recommenc� � consommer de la coca�ne, drogues semblables � la psychose qui a pr�c�d� les �v�nements d�crits au moment de l'infraction initiale", c'est-�-dire le meurtre de 1978, et la "tr�s grave agression [...] en 1990". Par cons�quent,

[TRADUCTION] le comportement r�cent [de l'intim�], qui est pass� de la marijuana � la coca�ne, auquel s'ajoute son refus d'assumer la responsabilit� de ses actes, d�montre qu'il ne se soucie nullement de la nature et de l'�tendue du risque qu'il repr�sente pour le public. [L'intim�] ne comprend pas sa maladie, n'en saisit pas les cons�quences probables et, de ce fait, repr�sente toujours un risque important pour la s�curit� du public. [Je souligne.]

45 Comme je l'ai mentionn�, la Cour d'appel a retenu la conclusion de la Commission d'examen que l'intim� [TRADUCTION] "souffre encore d'un trouble de la personnalit� antisociale exacerb� par l'abus d'alcool et d'autres drogues" (par. 20). Dans ces circonstances, j'estime en toute d�f�rence qu'il n'�tait pas d�raisonnable pour la Commission de conclure qu'en raison de sa capacit� d�montr�e de se livrer � des actes de violence lorsqu'il prend des amph�tamines ou de la coca�ne -- maintenant li�e � la preuve r�cente qu'il a recommenc� � consommer de la coca�ne - l'intim� repr�sente un risque important pour la s�curit� du public. Il est possible, comme le d�montre ma coll�gue la juge Arbour, de voir les faits sous un jour diff�rent mais, � mon humble avis, la d�cision de la Commission se situait dans la gamme des d�cisions raisonnablement possibles : Ryan, pr�cit�, par. 56.

46 La Commission d'examen avait pour mandat de centrer son analyse sur l'"�tat mental" g�n�ral de l'intim� � la date de l'audition, ainsi que sur "la n�cessit� de prot�ger le public face aux personnes dangereuses, [les] besoins [de l'accus� et] la n�cessit� de sa r�insertion sociale" [C.cr., art. 672.54]. � mon humble avis, la d�cision de la Commission satisfait au crit�re du caract�re raisonnable d�crit dans l'arr�t Southam, pr�cit�, sous la plume du juge Iacobucci, au par. 56 :

[...] la cour qui contr�le une conclusion en regard de la norme de la d�cision raisonnable doit se demander s'il existe quelque motif �tayant cette conclusion. Le d�faut, s'il en est, pourrait d�couler de la preuve elle-m�me ou du raisonnement qui a �t� appliqu� pour tirer les conclusions de cette preuve. Un exemple du premier type de d�faut serait une hypoth�se qui n'avait aucune assise dans la preuve ou qui allait � l'encontre de l'essentiel de la preuve. Un exemple du deuxi�me type de d�faut serait une contradiction dans les pr�misses ou encore une inf�rence non valable.

47 En l'esp�ce, le "raisonnement" par lequel la Commission a tent� de tirer des conclusions du retour de l'intim� � la consommation de coca�ne relevait tout � fait de son champ d'expertise. Tel qu'il a �t� mentionn�, la Cour d'appel a estim� que la preuve ne [TRADUCTION] "permettait pas" pareilles conclusions mais, � mon humble avis, cette question relevait de l'expertise de la Commission et c'est � elle et non au tribunal de r�vision qu'il appartenait de se prononcer sur la valeur probante de cette preuve.

E. Admission de la nouvelle preuve

48 L'appel d'une ordonnance est "fond� sur la transcription d�pos�e aupr�s de la cour d'appel et sur les autres �l�ments de preuve dont la cour d'appel accepte la pr�sentation lorsqu'elle estime que la justice l'exige" (je souligne) (C.cr., par. 672.73(1)). Une expression semblable appara�t �galement dans l'�ventail des pouvoirs dont jouit une cour d'appel pour admettre une nouvelle preuve dans le cadre d'un appel en mati�re criminelle (C.cr., par. 683(1) : "dans l'int�r�t de la justice").

49 L'intim� soutient que la Cour d'appel n'a pas clairement accept� ou rejet� la nouvelle preuve, car elle n'a rendu aucune ordonnance dans un sens ou dans l'autre. Il semble toutefois clair que la demande de production d'une nouvelle preuve a �t� rejet�e parce que : (i) aucune ordonnance l'accueillant n'a �t� rendue; (ii) nulle part dans les motifs de la cour n'a-t-on fait allusion aux renseignements r�v�l�s par la nouvelle preuve; (iii) au par. 37 de ses motifs, la Cour d'appel conclut qu'au vu de [TRADUCTION] "la preuve dont elle disposait, la Commission ne pouvait conclure � juste titre que l'appelant repr�sentait un risque important pour la s�curit� du public" (je souligne), et elle accueille l'appel imm�diatement apr�s, au par. 38, sans plus d'explication.

50 La Cour d'appel n'ayant pas motiv� son refus d'admettre la nouvelle preuve en l'esp�ce, nous en sommes r�duits � �mettre des hypoth�ses sur la raison pour laquelle elle l'a rejet�e parce que "la justice l'exige". L'intim� tente de d�gager le fondement de ce rejet sub silencio en renvoyant au crit�re �tabli dans l'arr�t Palmer c. La Reine, [1980] 1 R.C.S. 759, p. 775, selon lequel les conditions suivantes doivent �tre r�unies :

(1)		On ne devrait g�n�ralement pas admettre une d�position qui, avec diligence raisonnable, aurait pu �tre produite au proc�s, � condition de ne pas appliquer ce principe g�n�ral de mati�re aussi stricte dans les affaires criminelles que dans les affaires civiles.
(2)		La d�position doit �tre pertinente, en ce sens qu'elle doit porter sur une question d�cisive ou potentiellement d�cisive quant au proc�s.
(3)		La d�position doit �tre plausible, en ce sens qu'on puisse raisonnablement y ajouter foi, et
(4)		elle doit �tre telle que si l'on y ajoute foi, on puisse raisonnablement penser qu'avec les autres �l�ments de preuve produits au proc�s, elle aurait influ� sur le r�sultat.

51 L'avocat de l'intim� admet que la "nouvelle preuve" ne pouvait pas, avec diligence raisonnable, �tre produite � l'audition initiale (les �v�nements qui y sont relat�s �tant post�rieurs � l'audition) et qu'elle �tait pertinente quant � la propension all�gu�e de l'intim� � la violence, mais il soutient que c'est n�anmoins � juste titre qu'elle a �t� rejet�e puisqu'elle �tait compos�e en grande partie de notes des soins infirmiers et de dossiers d'h�pital qui n'�taient "pas dignes de foi". Selon lui, on n'aurait pas pu s'attendre � ce que cette preuve ait une incidence quelconque sur la d�cision de la Commission (qui avait d�j� conclu que l'intim� repr�sentait un risque important pour la s�curit� du public) ou sur celle de la Cour d'appel, qui �tait encline � accueillir l'appel, car le pr�judice manifeste caus� par cette nouvelle preuve l'emportait sur sa faible valeur probante.

52 Je n'accepte pas cette analyse. Tout d'abord, les expressions " lorsque la justice l'exige" et "dans l'int�r�t de la justice" employ�es aux par. 672.73(1) et 683(1) C.cr. tirent leur sens du contexte dans lequel on cherche � les appliquer. Bien que certaines consid�rations s'appliquent de mani�re g�n�rale, soit par exemple l'int�r�t du public � assurer le r�glement d�finitif des litiges et � �viter la r�ouverture du d�bat devant la Cour d'appel � partir d'un dossier diff�rent de celui dont le tribunal de premi�re instance disposait, il existe aussi des diff�rences. L'appel d'une ordonnance de non-responsabilit� criminelle sous le r�gime de la Partie XX.1 du Code criminel ne constitue pas une proc�dure contradictoire d'appel d'une poursuite criminelle (comme dans les arr�ts Palmer, pr�cit�, et R. c. Stolar, [1988] 1 R.C.S. 480), mais bien une proc�dure administrative de nature inquisitoire visant � �tablir le r�gime le moins contraignant pour un d�tenu non responsable criminellement tout en pr�servant la s�curit� du public. Comme le juge Goldie l'a dit dans Davidson c. British Columbia (Attorney General) (1993), 87 C.C.C. (3d) 269 (C.A.C.-B.), p. 277, [TRADUCTION] "[e]n vertu de l'art. 672.54 du Code, le traitement d'une personne qui ne peut distinguer le bien du mal vise � rem�dier � cette incapacit�. Ni son objet ni son effet ne rev�tent un caract�re p�nal. Lorsque la d�tention d'une telle personne est ordonn�e, elle vise � pr�venir l'accomplissement d'actes antisociaux, et non � ch�tier."

53 M�me dans le contexte contradictoire d'un appel en mati�re criminelle, le crit�re ne consiste pas en l'application m�canique du crit�re �nonc� dans l'arr�t Palmer, mais bien en celui que pr�voit la loi, soit "l'int�r�t de la justice". La Cour a ainsi statu� dans l'arr�t R. c. Warsing, [1998] 3 R.C.S. 579, que "le d�faut de satisfaire � l'obligation de diligence raisonnable ne doit pas [TRADUCTION] "l'emporter sur l'obtention d'un r�sultat juste"" (par. 56).

54 Dans ce contexte, "la justice" s'entend non seulement de la justice � l'�gard du d�tenu non responsable criminellement, dont la libert� est en jeu, mais �galement de la justice � l'�gard du public, dont on cherche � assurer la protection. Comme la Cour d'appel a critiqu� la Commission pour s'�tre ind�ment attard�e sur le d�faut de l'intim� de renoncer � sa consommation de drogue en l'absence d'une preuve suffisante d'une pr�disposition persistante � la violence, la preuve dont la production �tait demand�e (incluant celle des actes de violence physique et de la r�cente menace de mort) �tait extr�mement pertinente.

55 Si je m'�tais rang� � l'avis de la Cour d'appel sur la minceur du dossier quant � la propension � la violence, j'estimerais � plus forte raison que "la justice exigeait" la prise en compte des renseignements fiables les plus r�cents � ce sujet.

56 L'arr�t Starson c. Swayze, 2003 CSC 32, rendu simultan�ment, illustre encore un autre contexte (et l'application d'une autre loi) d'admission de la nouvelle preuve. Dans cette affaire, l'appelant, un m�decin traitant, cherchait � faire admettre une nouvelle preuve de l'�tat mental de son patient qui refusait de se soumettre � un traitement m�dical, afin d'obtenir le consentement de son mandataire sp�cial en vertu de la Loi de 1996 sur le consentement aux soins de sant�, L.O. 1996, ch. 2, Ann. A, laquelle permet au tribunal de "recevoir de nouvelles preuves ou des preuves additionnelles, selon ce qu'il juge �quitable" (par. 80(9)). Nous avons conclu dans cette affaire qu'il ne serait pas "�quitable" de recevoir la preuve offerte. Contrairement au pr�sent pourvoi, cette affaire ne soulevait pas la question de la s�curit� du public. En l'esp�ce, la lib�ration inconditionnelle du d�tenu non responsable criminellement mettrait en pratique un terme � la capacit� de l'�tat de surveiller et de contr�ler son �tat mental sous le r�gime de la Partie XX.1 du Code criminel. En revanche, les dispositions de la Loi de 1996 sur le consentement aux soins de sant� relatives au consentement du mandataire sp�cial n'emp�chent pas le m�decin traitant de soumettre une nouvelle demande � la Commission du consentement et de la capacit� en s'appuyant sur des donn�es � jour. Bref, les cons�quences du rejet erron� de l'intervention de l'�tat sont beaucoup plus graves dans le cas d'un d�tenu non responsable criminellement que dans le cas d'un patient qui refuse de se soumettre � un traitement m�dical. La justice exige en l'esp�ce un autre r�sultat.

57 La preuve offerte concernait directement la r�serve qu'avait la Cour d'appel quant � l'insuffisance de la preuve de la propension continue de l'intim� � la violence et, si elle �tait digne de foi, elle aurait d� �tre admise comme "port[ant] sur une question d�cisive" (Palmer, p. 776).

58 La preuve �tait digne de foi. Depuis plus de trente ans, les notes des soins infirmiers et les dossiers d'h�pital sont couramment admis comme preuve prima facie de la v�racit� de leur contenu, en application de l'exception � l'exclusion du ou�-dire pour les dossiers d'entreprise : Ares c. Venner, [1970] R.C.S. 608, le juge Hall, p. 626 :

Les dossiers d'h�pitaux, y compris les notes des infirmi�res, r�dig�s au jour le jour par quelqu'un qui a une connaissance personnelle des faits et dont le travail consiste � faire les �critures ou r�diger les dossiers, doivent �tre re�us en preuve, comme preuve prima facie des faits qu'ils relatent.

59 Selon la jurisprudence plus r�cente, ces dossiers d'entreprise seraient admissibles suivant les principes applicables � l'analyse relative au ou�-dire qui a �t� consacr�e dans l'arr�t R. c. Khan, [1990] 2 R.C.S. 531. Si l'intim� voulait contester l'exactitude des dossiers d'h�pital, il pouvait le faire, mais il a choisi de ne pas se pr�valoir de cette possibilit� : R. c. L�vesque, [2000] 2 R.C.S. 487, par. 26-28. On ne devrait, � mon avis, accorder la lib�ration inconditionnelle qu'apr�s avoir examin� tous les �l�ments de preuve fiables connus autant au moment de l'audition par la Commission qu'au moment du contr�le en appel, le cas �ch�ant.

60 Je dois ajouter que le d�roulement du pr�sent pourvoi a �t� compliqu� par l'absence de motifs � l'appui du rejet par la Cour d'appel de la requ�te en production d'une nouvelle preuve. L'intim� et le minist�re public se sont tous deux vus contraints d'�mettre des hypoth�ses sur la d�cision de la Cour d'appel et les motifs qui peuvent la sous-tendre. L'acceptation ou le rejet d'une requ�te en production d'une nouvelle preuve peut avoir une incidence d�terminante sur l'issue d'un appel. Pour paraphraser l'arr�t R. c. Sheppard, [2002] 1 R.C.S. 869, 2002 CSC 26, par. 28, lorsque les lacunes des motifs d'une cour d'appel interm�diaire font obstacle � un examen valable en appel de la justesse de la d�cision devant notre Cour, une erreur de droit a �t� commise. Pour �tre juste envers le d�tenu non responsable criminellement et envers le public, le tribunal si�geant en r�vision devrait motiver sa d�cision d'admettre ou de rejeter la nouvelle preuve dans l'ex�cution du mandat que lui conf�rent les art. 672.54 et 672.73(1) C.cr.

61 Quoi qu'il en soit, je suis d'avis que la nouvelle preuve aurait d� �tre admise comme faisant partie du dossier dans le pr�sent pourvoi.

F. La d�cision "la moins s�v�re et la moins privative de libert�"

62 Ayant donc confirm� le caract�re raisonnable de la conclusion de la Commission selon laquelle l'intim� repr�sente toujours un risque important pour la s�curit� du public, je passe � pr�sent � la question de savoir si, sous le r�gime de l'art. 672.54, l'ordonnance de la Commission est la d�cision la moins s�v�re et la moins privative de libert� � l'�gard de l'intim� qui permette n�anmoins d'assurer la s�curit� du public. Pour rendre son ordonnance, la Commission doit, une fois de plus, tenir compte

	de la n�cessit� de prot�ger le public face aux personnes dangereuses, de l'�tat mental de l'accus� [non responsable criminellement] et de ses besoins, notamment de la n�cessit� de sa r�insertion sociale.
	(art. 672.54 C.cr.; Winko, pr�cit�, par. 62)

63 Comme je l'ai mentionn�, l'intim� a b�n�fici� de lib�rations conditionnelles de 1994 � 1996. Cette situation a chang� en 1997, en raison de sa consommation de drogue. On a substitu� � l'ordonnance de lib�ration conditionnelle une ordonnance de d�tention assortie de conditions applicables aux absences. Cette derni�re ordonnance a �t� maintenue en 1998 et en 1999. En 2000, les "conditions applicables aux absences" ont �t� rendues plus contraignantes lorsqu'on a d�couvert, le 25 janvier 2000, que l'intim� prenait de la coca�ne. � ce moment, le personnel de l'h�pital charg� de formuler ses recommandations a d�clar� � la Commission :

[TRADUCTION] Sous surveillance �troite, [l'intim�] a consomm� des drogues illicites. Sans une surveillance directe et constante, l'h�pital n'est pas convaincu de pouvoir emp�cher [l'intim�] de se livrer � des actes hautement risqu�s. [Je souligne.]

De l'avis du personnel du KPH, vu le lien qu'il avait �tabli entre la propension de l'intim� � la violence et sa consommation de coca�ne, l'ordonnance de d�tention � l'h�pital assortie de conditions applicables aux absences s'av�rait donc la d�cision [TRADUCTION] "la moins s�v�re et la moins privative de libert� en tenant compte de la n�cessit� de prot�ger la s�curit� du public".

64 Le paragraphe 61 de l'arr�t Winko, pr�cit�, mentionne le succ�s ou l'�chec d'un programme de traitement suivi par un d�tenu non responsable criminellement comme un facteur pertinent.

65 L'intim� affirme que, s'il commet de nouvelles infractions sous l'influence de la drogue, il sera passible, comme n'importe qui d'autre, des sanctions pr�vues au Code criminel. Or, il ne s'agit pas de " n'importe qui d'autre". Il s'agit d'un d�tenu non responsable criminellement chez qui il existe un lien entre l'abus de drogues et sa propension � la violence, y compris au meurtre, et la partie XX.1 du Code criminel est con�ue pour prendre des mesures qui prot�geront la s�curit� du public avant que des actes de violence surviennent, et non (comme c'est le cas habituellement) pour punir le contrevenant apr�s coup.

66 Dans son ordonnance, la Commission a not� qu'elle avait l'obligation de tenir compte "de la n�cessit� de prot�ger le public face aux personnes dangereuses, de l'�tat mental de l'accus� et de ses besoins, notamment de la n�cessit� de sa r�insertion sociale" (C.cr. art. 672.54).

67 J'ai d�j� fait mention de l'examen par la Commission de l'�tat mental de l'intim� ainsi que des efforts d�ploy�s maintes fois par les autorit�s de l'h�pital pour aider l'intim� � r�int�grer la soci�t�. La Commission a de toute �vidence compris le d�sir de l'intim� de vivre avec son fils et sa frustration �vidente du fait d'�tre maintenu en d�tention. Le facteur d�terminant qui a fait pencher la balance � l'encontre d'une ordonnance moins contraignante a �t� le fait que l'intim� a recommenc� � consommer de la coca�ne (ou la nouvelle r�v�lation � cet effet) et son lien pharmacologique avec les amph�tamines qui ont provoqu� le meurtre en 1978. Ce fait nouveau a incit� les autorit�s de l'h�pital � se prononcer � l'encontre d'une ordonnance de lib�ration conditionnelle :

[TRADUCTION] Sans une surveillance directe et constante, notre �quipe n'est pas convaincue de pouvoir emp�cher [l'intim�] de se livrer � des actes hautement risqu�s qui sont susceptibles d'accro�tre sensiblement la probabilit� d'une r�cidive.

68 La Commission a convenu avec l'h�pital qu'on ne pouvait gu�re esp�rer contr�ler efficacement les habitudes de consommation de l'intim� avec le type de surveillance ponctuelle qui pourrait �tre exerc�e sur lui dans la collectivit�. La Commission a reconnu la facilit� avec laquelle l'intim� avait d�jou� son programme de d�pistage de drogue dans le pass�. Compte tenu du lien qui existe entre la violence de l'intim� et sa consommation de coca�ne d�couverte depuis peu, la Commission a conclu :

[TRADUCTION] Malheureusement, [l'intim�] a choisi de ralentir sa progression vers la r�adaptation et d'entraver les efforts d�ploy�s par ses aidants pour le r�int�grer dans la soci�t�. Nous notons que d�s ao�t 1999, l'�quipe de traitement �tait dispos�e � appuyer son transfert dans la r�gion de Chatham, qui demeure encore aujourd'hui l'endroit o� [l'intim�] d�sire �tre relocalis�. Par son comportement, [l'intim�] a �t� l'artisan de son propre malheur, bien qu'il soit improbable qu'il reconnaisse ou qu'il appr�cie son r�le dans ce qu'il consid�rera sans aucun doute comme une punition que lui infligent la Commission d'examen et l'h�pital.

69 Je ne crois pas qu'il soit d�raisonnable pour la Commission de conclure, compte tenu qu'il est difficile de surveiller le probl�me de coca�ne dans la collectivit�, qu'une ordonnance de d�tention au KPH est la d�cision "la moins s�v�re et la moins privative de libert�" � l'heure actuelle. Il n'est pas facile de trancher le cas de l'intim� mais, une fois confirm� le caract�re raisonnable de la conclusion de la Commission que l'intim� repr�sente "un risque important pour la s�curit� du public" (art. 672.54), nous devrions nous garder d'infirmer � la l�g�re la d�cision d'expert rendue par la Commission quant � la gestion de ce risque. La nouvelle preuve du comportement violent doit �tre prise en compte aussi parce que "la justice l'exige". D�s que l'intim� aura renonc� � sa consommation de coca�ne, on envisagera assur�ment de rendre une ordonnance moins contraignante. Parmi les conditions applicables aux absences de l'intim� susceptibles d'�tre modifi�es, on pourrait pr�voir une proc�dure de d�pistage au sein de la collectivit� qui ferait l'objet d'une surveillance plus �troite que celle qui existait avant 2000. Il n'appartient cependant pas � la Cour de se lancer dans la micro gestion de ces conditions et, dans l'�tat actuel des choses, j'estime qu'il n'�tait pas d�raisonnable pour la Commission de conclure que sa d�cision �tait la moins s�v�re et la moins privative de libert�, �tant donn� la consommation de coca�ne � laquelle continue de se livrer l'intim� et le risque qu'il repr�sente de ce fait pour la soci�t�.

V. Conclusion

70 � mon sens, l'ordonnance de la Commission dat�e du 17 mai 2000 n'�tait pas d�raisonnable au vu de la preuve dont elle disposait. Il ne suffit pas pour l'intim� d'avancer que d'autres membres d'autres commissions d'examen auraient pu interpr�ter diff�remment le t�moignage du Dr Chan, les fondements m�dicaux qui le sous-tendent ou l'importance de la r�v�lation r�cente du fait que l'intim� continue de consommer de la drogue, notamment de la coca�ne. La Cour d'appel a appr�ci� � nouveau la preuve et l'a jug�e insuffisante, mais c'est � la Commission qu'il revenait de se prononcer � cet �gard et celle-ci a rendu une d�cision que la preuve lui permettait raisonnablement de rendre.

71 M�me si j'�tais convaincu, � l'instar de la Cour d'appel, que [TRADUCTION] "la preuve ne permettait pas d'�tablir que l'appelant repr�sente un risque important pour la s�curit� du public, et ce, m�me lorsqu'il consomme de la drogue" ( par. 29), je serais n�anmoins d'avis d'accueillir le pourvoi sur le fondement du dossier tel qu'il a �t� enrichi par la nouvelle preuve. J'estime qu'il est g�n�ralement souhaitable pour une cour d'appel d'admettre une nouvelle preuve qui est digne de foi et qui concerne la question du risque pour la s�curit� du public, parce que "la justice l'exige" (C.cr., par. 672.73(1)). Il va de soi qu'on doit donner l'occasion au d�tenu non responsable criminellement de contredire la nouvelle preuve selon laquelle il pr�sente un risque en permettant la tenue d'un contre-interrogatoire ou la production d'�l�ments de preuve suppl�mentaires en r�ponse. Toutefois, il incombe en d�finitive au minist�re public de d�montrer que l'intim� repr�sente un risque important pour la s�curit� du public et, � cet �gard, on devrait lui offrir toutes les possibilit�s raisonnables de le faire.

72 L'internement de l'intim� sera, bien s�r, soumis � un processus continu de r�vision par la Commission au moins une fois tous les 12 mois. Le pr�sent pourvoi n'aborde donc pas, et il vise encore moins � la trancher, la question de savoir si � l'heure actuelle l'intim� repr�sente encore un risque important pour la s�curit� du public. Nous d�cidons simplement que la Cour d'appel a eu tort d'annuler l'ordonnance rendue par la Commission le 17 mai 2000.

VI. Dispositif

73 La nouvelle preuve est admise. Le pourvoi est accueilli. La d�cision de la Cour d'appel est annul�e et l'ordonnance de la Commission d'examen, dat�e du 17 mai 2000, est r�tablie.

Version fran�aise des motifs rendus par

74 LA JUGE ARBOUR (dissidente) :� La Cour d'appel a infirm� une ordonnance de d�tention rendue par la Commission ontarienne d'examen (la "Commission") sous le r�gime des dispositions du Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46, traitant des personnes non responsables criminellement pour cause de troubles mentaux. Je partage l'avis de la Cour d'appel que la d�cision de la Commission �tait d�raisonnable � deux �gards. Premi�rement, la Commission a tir� une conclusion d�raisonnable sur la dangerosit� de l'intim� et, deuxi�mement, elle lui a impos� la d�cision la plus s�v�re et la plus privative de libert�, sans se demander si d'autres d�cisions moins privatives de libert� conviendraient. Ce dernier motif constitue �galement une erreur de droit, car l'art. 672.54 oblige express�ment la Commission � rendre la d�cision la moins s�v�re et la moins privative de libert� qui puisse produire le r�sultat escompt�.

I. Les faits

75 Mon coll�gue le juge Binnie a d�j� expos� les faits saillants de l'affaire. Je soulignerai ce qui me para�t important.

76 L'intim� a �t� d�clar� non coupable de meurtre en 1978 pour cause de troubles mentaux. Selon le diagnostic pos� � l'�poque, l'intim� souffrait d'une psychose provoqu�e par la drogue, dont il est maintenant en r�mission depuis de nombreuses ann�es. Au moment de l'audition, l'intim� n'�tait atteint d'aucune maladie mentale grave et n'en avait pas souffert depuis longtemps. Il consommait cependant de l'alcool et des drogues sur une base r�guli�re, bien qu'il ait tent� de le dissimuler en d�jouant les tests d'urine auxquels il �tait astreint. L'intim� souffre d'un trouble de la personnalit� antisociale exacerb� par son abus d'alcool et d'autres drogues.

77 Imm�diatement apr�s son proc�s en 1978, l'intim� a �t� d�tenu au Centre de sant� mentale de Penetanguishene, o� il est demeur� de fa�on plus ou moins permanente jusqu'en 1986. � partir de ce moment, il a b�n�fici� d'un acc�s �largi � la vie dans la collectivit� jusqu'en 1990, ann�e o� il a �t� d�clar� coupable de voies de fait causant des l�sions corporelles pour avoir fractur� la m�choire d'un homme avec une baguette de billard. Cette infraction lui a valu une peine d'emprisonnement de 14 mois assortie de deux ans de probation. L'intim� avait beaucoup bu avant de perp�trer cette infraction et, interrog� en prison peu de temps apr�s son arrestation, il a d�clar� [TRADUCTION] "avoir consomm� de la marijuana et un tas d'autres choses au cours des deux ou trois semaines pr�c�dant l'arrestation", selon ce que r�v�le un dossier d'h�pital. Rien n'indiquait toutefois qu'il �tait sous l'influence d'amph�tamines ou d'autres drogues similaires, ou encore qu'il n'�tait pas criminellement responsable pour cause de troubles mentaux quant � ces voies de fait. � la fin de son incarc�ration, l'intim� a �t� examin� par un psychiatre qui a conclu que M. Owen n'�tait pas d�prim�, qu'il ne montrait aucun signe d'anxi�t�, qu'il ne souffrait d'aucun trouble de l'esprit ou de la parole et qu'il ne semblait pas �tre en proie � des hallucinations ou � des d�lires. Bien qu'il soit demeur� assujetti au r�gime de non-responsabilit� criminelle pr�vu au Code criminel - n'ayant pas b�n�fici� d'une lib�ration inconditionnelle depuis l'ordonnance initiale de d�tention rendue en 1978 - , l'intim� a purg� sa peine en prison. Il a par la suite �t� transf�r� au Kingston Psychiatric Hospital (KPH) et son cas a �t� examin� plusieurs fois par la Commission.

78 Tout au long des ann�es 90, les rapports d'h�pitaux ont constamment fait �tat des ant�c�dents d'abus d'alcool et d'autres drogues de M. Owen, ainsi que de son incapacit� ou de son refus de reconna�tre son probl�me d'abus.

79 En 1994, puis � nouveau en 1995 et en 1996, la Commission a ordonn� que M. Owen soit lib�r� conditionnellement. En 1997, apr�s qu'un test eut r�v�l� la pr�sence de cannabis, la Commission a, sur la recommandation de l'h�pital, rendu � l'�gard de l'intim� une ordonnance de garde dont les modalit�s lui permettaient de vivre dans la collectivit� � la discr�tion de l'h�pital. La Commission d'examen a rendu des ordonnances similaires en 1998 et en 1999. Il est int�ressant de constater ce qui a pouss� l'h�pital � changer sa position et � recommander � la Commission la d�tention avec possibilit� de lib�ration plut�t que la lib�ration conditionnelle. Il semble y avoir peu de diff�rence entre ces deux ordonnances. Dans les deux cas, l'intim� peut vivre au sein de la collectivit� et doit se pr�senter r�guli�rement au KPH. Toutefois, du point de vue de la commodit� administrative, l'h�pital estimait qu'une ordonnance de d�tention lui accordait une plus grande marge de manoeuvre. Il l'explique en ces termes dans son rapport dat� d'avril 1997 destin� � la Commission :

	[TRADUCTION] Une fois de plus, M. Owen a d�montr� qu'il ne cessera vraisemblablement pas � plus long terme de commettre des infractions mineures ou des actes par ailleurs l�gaux qui lui sont interdits. Il l'a reconnu devant la Commission au cours d'auditions ant�rieures, et les faits semblent le confirmer. Cependant, de l'avis de l'h�pital, M. Owen s'en est par ailleurs relativement bien sorti face � de graves difficult�s m�dicales, sociales, financi�res et familiales. Au cours des derni�res ann�es, rien n'indique qu'il se soit livr� � des actes criminels dont quelqu'un aurait �t� victime. En fait, M. Owen, aid� de sa conjointe de fait (qui souffre elle-m�me d'une maladie mentale grave), s'est bien d�brouill� pour s'occuper de son jeune fils et vivre en paix au sein de la collectivit� malgr� ses tr�s maigres ressources. En d�pit de conflits occasionnels, l'h�pital se voit jouer un r�le continu et important dans cet exercice.
	L'h�pital d�plore que, notamment � cette occasion, aucune ordonnance de garde n'ait �t� rendue qui lui aurait permis de prendre des mesures proactives face aux difficult�s manifestement croissantes chez les Owen. En l'esp�ce, il est tout � fait pr�visible que ces difficult�s croissantes vont culminer dans la consommation de substances interdites. Cette situation est d�j� survenue � plusieurs reprises et se reproduira. Dans ces cas-l�, si l'h�pital ne peut demander l'hospitalisation ou d'importants changements dans la surveillance de M. Owen, la collectivit� court un risque. La collectivit� ne comprendrait pas pourquoi le KPH n'est pas en mesure de r�agir rapidement � l'aggravation connue du risque. Cette situation se r�p�tera fort probablement � maintes reprises. Le r�le de l'h�pital devrait �tre de g�rer la situation sans tarder par des mesures qui soient compatibles avec les besoins de M. Owen sur le plan de sa r�adaptation � long terme et qui ne compromettent pas la s�curit� du public. L'h�pital ne voit pas l'utilit� d'hospitaliser chaque fois M. Owen pendant plusieurs mois jusqu'� ce que la Commission ait fait conna�tre son bon plaisir. En fait, l'arrangement administratif actuel - l'ordonnance de lib�ration conditionnelle - produit des effets qui vont � l'encontre des besoins de M. Owen sur le plan de sa r�adaptation et ne prot�ge en rien la s�curit� du public.

80 Cet extrait fait clairement ressortir que, de l'avis de l'h�pital - auquel la Commission a souscrit - il convenait malgr� tout de rendre une d�cision en apparence plus s�v�re et plus privative de libert� (soit une ordonnance de d�tention plut�t qu'une lib�ration conditionnelle), mais non parce que l'intim� repr�sentait un risque plus important pour le public. En fait, il semble que ce soit tout le contraire. On a ordonn� que l'intim� soit d�tenu � l'h�pital pour que l'h�pital puisse, en cas de manquement � une condition, le r�ins�rer dans la collectivit� plus rapidement que s'il �tait soumis � une ordonnance de lib�ration conditionnelle, en ex�cution de laquelle seule la Commission aurait pu le lib�rer de nouveau apr�s le d�lai d'attente requis pour la tenue d'une audition.

81 En ao�t 1999, pendant qu'il �tait soumis � une ordonnance de d�tention � l'h�pital, l'intim� a �t� accus� de conduite avec facult�s affaiblies et r�admis � l'h�pital peu de temps apr�s. Deux mois plus tard, il est retourn� vivre dans la collectivit�.

82 En janvier 2000, son test de d�pistage de cannabis et de coca�ne s'est r�v�l� positif. Il a admis qu'il prenait toujours de l'alcool et de la marijuana (niant toutefois consommer de la coca�ne) et qu'il avait substitu� des �chantillons d'urine au cours de tests ant�rieurs pour �viter de se faire prendre. Il a affirm� n'avoir nullement l'intention de s'abstenir de consommer de l'alcool et des drogues.

83 Comme en fait foi ce qui pr�c�de, l'intim� n'a pr�sent� aucun sympt�me d'une psychose ou d'une autre maladie mentale grave depuis les �v�nements se rapportant directement � la perp�tration, en 1978, de l'infraction pour laquelle il a �t� d�clar� non coupable pour cause de troubles mentaux ("l'infraction initiale"). Depuis, l'intim� a eu plusieurs d�m�l�s avec la justice. Il a �galement manifest� de la frustration face � sa d�tention sous le r�gime de non-responsabilit� criminelle. On a consign� les renseignements suivants dans un document du KPH touchant la p�riode �coul�e entre juillet 1991 et janvier 1992 :

	[TRADUCTION] M. Owen souffre d'une coronaropathie grave, affection pour laquelle il est suivi de pr�s. Il a d�j� �t� victime de crises cardiaques et il prend un b�tabloquant et de l'Isordil. Cependant, en d�cembre 1991, il a commenc� � refuser de prendre ces m�dicaments pour exprimer sa frustration d'�tre pris dans le syst�me.
	Tout compte fait, M. Owen est frustr� de son s�jour dans notre service en raison des restrictions importantes � sa libert�. Son mandat le confine essentiellement � une aile � s�curit� moyenne, sans qu'il puisse jouir de privil�ges � l'ext�rieur. Cette mesure lui a �t� impos�e par suite de ses r�centes r�cidives. M. Owen adh�re � une philosophie tr�s claire, soit d'assumer les cons�quences de ses actes, et il pr�f�re que sa sanction soit limit�e dans le temps comme si elle relevait du syst�me de justice p�nale. Pour lui, l'incertitude que comporte le syst�me de mandats du lieutenant-gouverneur est une importante source de stress. Il n'a pu nous assurer que sa r�insertion dans la collectivit� se passerait sans incident. Il a tenu � dire qu'il s'attendait � subir les cons�quences de tout acte ill�gal qu'il commettrait. Le sort qui l'attendait au sein de l'unit� � s�curit� moyenne a donc, semble-t-il, provoqu� chez lui une grande col�re et une grande frustration et il souhaite acc�l�rer sa r�insertion dans la collectivit� afin de pouvoir nouer des liens plus �troits avec son amie et son jeune enfant et vivre avec eux. [Je souligne.]

84 Le personnel de l'h�pital a aussi �crit ce qui suit en vue de l'audition devant la Commission pr�vue en juillet 1993 :

	[TRADUCTION] [...] M. Owen estime que son comportement probl�matique des derni�res ann�es dans le syst�me de mandats du lieutenant-gouverneur est largement attribuable � la difficult� qu'il a eue � surmonter sa frustration d'�tre d�tenu aussi longtemps dans un syst�me con�u pour traiter les probl�mes de sant� mentale graves, alors qu'il n'en �prouve aucun. Il fait remarquer que chaque fois qu'il a contrevenu � la loi, par exemple en s'esquivant, son cas a �t� soumis au syst�me de justice p�nale et que ses comportements des derni�res ann�es n'ont jamais �t� consid�r�s comme imputables � des troubles mentaux. Il souligne que si l'existence d'une maladie mentale est n�cessaire pour �tre admis dans le syst�me, l'absence de maladie mentale semble n'importer que tr�s peu, sinon pas du tout, lorsqu'il s'agit d'en sortir. Il nie repr�senter un danger important pour le public. ...
	Selon le personnel de l'h�pital, M. Owen n'est pas atteint d'une maladie mentale grave et il ma�trise parfaitement ses gestes. La n�cessit� de placer M. Owen dans un milieu de garde ferm� tient uniquement au risque �lev� qu'il s'enfuie et � la n�cessit� de g�rer ce risque dans le cadre d'une ordonnance de garde. Ce patient ne repr�sente pas aux yeux de l'h�pital un risque important de violence pour la collectivit� si on entend par "important" une plus grande probabilit� de comportement violent que celle � laquelle on s'attendrait des personnes vivant dans la collectivit� dans laquelle M. Owen retournerait. Bien qu'on reconnaisse que M. Owen risque d'avoir, d'une fa�on ou d'une autre, des d�m�l�s avec la justice p�nale dans le futur, on estime que le risque que cela se produise par suite d'un comportement violent n'est pas sensiblement plus �lev� que pour la moyenne de la population, tout particuli�rement s'il continue � s'abstenir de consommer des drogues et de l'alcool. � l'heure actuelle, on ne pourrait certifier en vertu de la Loi sur la sant� mentale que M. Owen constitue un danger pour autrui, et il ne pourrait pas non plus �tre consid�r� comme un d�linquant dangereux atteint de troubles mentaux si la partie pertinente du Code criminel �tait mise en oeuvre. Outre le traitement des probl�mes persistants de drogue et d'alcool qu'il pourrait �prouver, il semblerait que les traitements psychosociaux disponibles pr�sentement ne soient gu�re indiqu�s. [Je souligne.]

85 En ce qui concerne l'absence de troubles mentaux, le personnel de l'h�pital a de nouveau not�, en octobre 1994 :

[TRADUCTION] M. Owen n'est pas atteint d'une maladie mentale grave. Il ne pourrait pas faire l'objet d'un certificat en vertu de la Loi sur la sant� mentale et, n'e�t �t� le statut que lui a d�cern� la Commission d'examen de l'Ontario constitu�e en vertu du Code criminel, il aurait obtenu son cong� de l'h�pital sans autre formalit�. Il est tr�s probable qu'il serait d�clar� coupable s'il �tait �tabli dans le futur qu'il s'est livr� � une activit� criminelle. [Je souligne.]

II. Dispositions l�gislatives

86 Je ne reproduirai pas int�gralement les dispositions l�gislatives pertinentes que le juge Binnie a cit�es dans ses motifs. Il suffira, pour les besoins de mon analyse, de reproduire les par. 672.78(1) et (3) ainsi que l'al. 686(1)a) du Code criminel, que j'examinerai maintenant. Par souci de commodit�, je reproduis �galement le par. 672.81(1) et l'art. 672.82, auxquels je renverrai plus loin.

672.78 (1) La cour d'appel peut accueillir l'appel interjet� � l'�gard d'une d�cision ou d'une ordonnance de placement et annuler toute ordonnance rendue par le tribunal ou la commission d'examen si elle est d'avis que, selon le cas :

a)		la d�cision ou l'ordonnance est d�raisonnable ou ne peut pas s'appuyer sur la preuve;
b)		il s'agit d'une erreur de droit;
c)		il y a eu erreur judiciaire.

...

(3) La cour d'appel, si elle accueille l'appel, peut :

a)		rendre la d�cision en vertu de l'article 672.54 ou l'ordonnance de placement que la commission d'examen aurait pu rendre;
b)		renvoyer l'affaire au tribunal ou � la commission d'examen pour une nouvelle audition, compl�te ou partielle, en conformit� avec les instructions qu'elle lui donne;
c)		rendre toute autre ordonnance que la justice exige.

	672.81 (1) La commission d'examen qui a rendu une d�cision � l'�gard d'un accus� tient une nouvelle audition au plus tard douze mois apr�s la d�cision et � l'int�rieur de chaque p�riode de douze mois suivante si la d�cision rendue en vertu de ces alin�as est toujours en vigueur, � l'exception d'une lib�ration inconditionnelle prononc�e en vertu de l'alin�a 672.54a).
	672.82 (1) La commission d'examen peut, en tout temps, tenir une audition � la demande de l'accus� ou de toute autre partie.
	(2) Lorsqu'une r�vision d'une d�cision vis�e par un appel interjet� par une partie en vertu de l'article 672.72 commence � la demande de cette partie, l'appel est r�put� avoir �t� abandonn�.
	686. (1) Lors de l'audition d'un appel d'une d�claration de culpabilit� ou d'un verdict d'inaptitude � subir son proc�s ou de non-responsabilit� criminelle pour cause de troubles mentaux, la cour d'appel :

peut admettre l'appel, si elle est d'avis, selon le cas :

(i)		que le verdict devrait �tre rejet� pour le motif qu'il est d�raisonnable ou ne peut pas s'appuyer sur la preuve,
(ii)		que le jugement du tribunal de premi�re instance devrait �tre �cart� pour le motif qu'il constitue une d�cision erron�e sur une question de droit,
(iii)		que, pour un motif quelconque, il y a eu erreur judiciaire;

III.		Analyse
A.		La norme de contr�le

87 Je conviens, essentiellement pour les motifs expos�s par le juge Binnie, que la norme de contr�le applicable � la d�cision de la Commission est celle de la d�cision raisonnable simpliciter. Je voudrais toutefois signaler que l'emploi par le l�gislateur d'un libell� presque identique � l'art. 672.78 et au sous-al. 686(1)a)(i) donne lieu � une anomalie manifeste, car les m�mes mots figurant dans diff�rents articles de la m�me loi - le Code criminel - rev�tent des sens tout � fait diff�rents. Comme l'a soulign� le juge Binnie, le terme "d�raisonnable" employ� � l'art. 672.78 signifie "d�raisonnables en ce sens qu'elles n'�taient �tay�es par aucun motif capable de r�sister � un examen assez pouss�" (par. 33), alors que la m�me expression employ�e � l'art. 686 renvoie � une d�cision qu'aucun juge des faits raisonnable ayant re�u des directives appropri�es et agissant de mani�re judiciaire n'aurait pu rendre (voir R. c. Biniaris, [2000] 1 R.C.S. 381, par. 36; R. c. Yebes, [1987] 2 R.C.S. 168, p. 185). � mon avis, c'est l� une norme qui s'apparente � celle de la d�cision manifestement d�raisonnable plut�t qu'� celle de la d�cision raisonnable simpliciter, telles qu'on les interpr�te en droit administratif.

88 En d�finitive, malgr� l'anomalie cr��e par le l�gislateur du fait qu'il a employ� un libell� identique dans diff�rents articles d'une m�me loi pour exprimer des concepts diff�rents, j'estime que la norme de contr�le applicable sous le r�gime de l'art. 672.78 est celle de la d�cision raisonnable simpliciter. La similarit� du libell� est trompeuse, car il existe d'importantes diff�rences quant au fond entre les deux articles. L'article 686 s'applique � une cour d'appel qui examine le verdict rendu par une cour (compos�e d'un juge seul ou d'un juge et d'un jury) alors que, sous le r�gime de l'art. 672.78, l'examen en appel vise la d�cision d'un organisme administratif. La diff�rence est �galement bien illustr�e par le fait que le caract�re d�raisonnable d'un verdict constitue une question de droit (Biniaris, pr�cit�) et que le pouvoir de redressement de la cour d'appel qui conclut au caract�re d�raisonnable d'un verdict de culpabilit� se limite � celui d'inscrire un verdict d'acquittement. En revanche, dans le cadre d'un appel pr�vu � l'art. 672.78, la cour d'appel peut, en pr�sence d'une "d�cision d�raisonnable", accueillir l'appel et substituer sa propre d�cision � celle de la Commission, ou lui renvoyer l'affaire (par. 672.78(3)). Pour les motifs expos�s par le juge Binnie, je suis d'avis qu'il y a lieu de recourir � la m�thode fonctionnelle et pragmatique pour d�terminer la norme de contr�le qui s'applique. Suivant cette m�thode, il convient en l'esp�ce d'appliquer la norme de la d�cision raisonnable simpliciter, la norme de la d�cision manifestement d�raisonnable commandant une trop grande retenue � l'�gard de la Commission.

89 Cela dit, je ne partage pas l'opinion du juge Binnie selon laquelle la conclusion de la Commission �tait raisonnable en l'esp�ce.

La d�cision de la Commission �tait-elle raisonnable?

(1) La conclusion de dangerosit�

90 D'entr�e de jeu, nous devons garder � l'esprit l'objet de la partie XX.1 du Code criminel, que notre Cour a �nonc� dans l'arr�t Winko c. Colombie-Britannique (Forensic Psychiatric Institute), [1999] 2 R.C.S. 625, par. 21 :

La partie XX.1 se dissocie de la notion voulant que le malade mental accus� d'une infraction puisse seulement �tre d�clar� coupable ou acquitt�; elle propose une troisi�me voie. D�sormais, une fois �tabli que, lorsqu'il a commis le crime, il souffrait d'une maladie mentale qui l'emp�chait de juger de la nature de l'acte ou de savoir que celui-ci �tait mauvais, l'accus� fait l'objet d'une proc�dure sp�ciale. Le tribunal ou une commission d'examen tient alors une audition pour d�terminer si la personne devrait �tre d�tenue dans un �tablissement s�curitaire, lib�r�e sous condition ou lib�r�e inconditionnellement. L'accent est mis sur la r�alisation des deux objectifs que sont la protection du public et le traitement juste et appropri� du contrevenant atteint de troubles mentaux. [Je souligne.]

91 Le pr�sent pourvoi soul�ve la question de l'�tendue et des limites de la "proc�dure sp�ciale" visant les malades mentaux. Ce n'est pas une proc�dure sp�ciale qui permet la d�tention perp�tuelle d'un d�linquant d'habitude qui, une seule fois, a commis un crime � un moment o� il �tait atteint de troubles mentaux. La perp�tration d'une "infraction initiale" assujettit son auteur au r�gime de non-responsabilit� criminelle, mais rien dans ce r�gime l�gal n'indique que la diff�rence de traitement entre l'accus� non responsable criminellement et les membres de la population g�n�rale est cens�e durer ind�finiment - en fait, c'est tout le contraire. L'arr�t Winko, pr�cit�, �tablit que c'est l'existence d'un risque important pour la collectivit� qui d�termine s'il y a lieu de retirer ou non un individu du r�gime de non-responsabilit� criminelle. Ce risque doit �tre appr�ci� � la lumi�re de plusieurs facteurs, y compris l'�tat mental de l'accus�.

92 L'intim� a d�j� enfreint la loi, et il est possible qu'il l'enfreigne � nouveau. C'est dans le cadre du syst�me de justice p�nale qu'il a eu et qu'il aura vraisemblablement encore � r�pondre de ces comportements. Il a commis une infraction tr�s grave de laquelle il a �t� d�clar� non responsable criminellement en raison de son �tat mental � l'�poque. Il s'agit � pr�sent de savoir si l'�tat mental de l'intim� et le risque qu'il peut pr�senter pour le public sont tels qu'ils commandent encore sa prise en charge selon la proc�dure sp�ciale instaur�e par la partie XX.1 du Code criminel, qui met l'accent sur "la r�alisation des deux objectifs que sont la protection du public et le traitement juste et appropri� du contrevenant atteint de troubles mentaux" (Winko, pr�cit�, par. 21) (je souligne).

93 La Commission a effectivement conclu que M. Owen souffrait d'un [TRADUCTION] "trouble grave de la personnalit� antisociale". Interrog� � ce sujet, le Dr Chan a expliqu� ce syndrome en ces termes :

[TRADUCTION]

D'accord - c'est un trouble de la personnalit� caract�ris� par un ensemble de traits qu'une personne manifeste sa vie durant : elle a de la difficult� � maintenir des relations � long terme; elle fuit ses responsabilit�s; elle se livre � des actes pouvant donner lieu � des accusations criminelles; elle est impulsive; elle a des probl�mes de - parfois cela peut s'ajouter � l'abus d'alcool et d'autres drogues - je crois - ce sont les principales caract�ristiques qui me viennent � l'esprit.

94 Il est certes clair que chacune de ces caract�ristiques de la personnalit� est ind�sirable, mais ce trouble ne constitue pas en soi une maladie mentale; il s'agit plut�t de sympt�mes qui t�moignent d'une m�sadaptation sociale. Le Dr Chan l'a confirm� en contre-interrogatoire :

[TRADUCTION]

D'accord - alors, au d�part, l'infraction initiale est un �tat psychotique parano�aque provoqu� par la drogue?

R.		Oui, c'est exact.
Q.		S'agit-il d'un �tat temporaire, passager, ou cet �tat est-il r�v�lateur d'un probl�me psychologique sous-jacent, une maladie mentale, que les drogues ou l'alcool ne font qu'exacerber?

Bon - Je ne crois pas qu'il ait une pr�disposition � la schizophr�nie. Je ne crois pas qu'il soit schizophr�ne. Je crois que n'importe qui peut devenir parano�aque en consommant des stimulants pendant une p�riode assez longue. Je pense donc que cela peut nous arriver � tous, peu importe notre pr�disposition � une maladie psychotique [...] donc, c'est de cette mani�re que j'envisage son probl�me de parano�a [...] [Je souligne.]

Plus tard, le Dr Chan a dit ceci au sujet de la consommation d'alcool de l'intim� :

[TRADUCTION]

Q.		[...] Est-il plus pr�dispos� � ce genre de comportement violent [lorsqu'il boit] en raison d'une maladie mentale sous-jacente?
R.		Non, je ne pense pas - je ne parlerais pas d'une "maladie". � mon avis, c'est une caract�ristique du fonctionnement de la personnalit�, tout comme l'abus d'alcool et d'autres drogues. [DA, p. 80]

La question fondamentale en l'esp�ce est donc celle de savoir si, apr�s plus de 20 ans d'acc�s �largi � la vie au sein de la collectivit� dans le cadre du r�gime de non-responsabilit� criminelle, la situation de l'intim� - son �tat mental, ses besoins - avait suffisamment chang� en mars 2000 pour justifier raisonnablement qu'il soit d�tenu et priv� de presque toute libert�. Les dossiers d'h�pitaux r�v�lent qu'on a toujours su que M. Owen n'avait pas cess� et ne cesserait vraisemblablement pas de consommer r�guli�rement de la drogue et de l'alcool.

95 Deux changements sont survenus au moment de l'audition de mars 2000. L'h�pital a d�cel� la pr�sence de coca�ne dans l'urine de M. Owen. Celui-ci a �galement admis avoir d�j� d�jou� les tests d'urine. Au sujet de la consommation de coca�ne, la Commission a d�clar� : [TRADUCTION] "M. Owen continue de souffrir d'un tr�s grave trouble de la personnalit� antisociale compliqu� dans le pass� par une psychose provoqu�e par la drogue et l'abus d'alcool, lesquels ont men� � la mort d'une personne en 1978 et � la tr�s grave agression commise contre une autre en 1990. [...] [Il] a recommenc� � consommer de la coca�ne, des drogues semblables � cette psychose qui a pr�c�d� les �v�nements d�crits au moment de l'infraction initiale" (je souligne). Comme je l'ai dit pr�c�demment, bien que certaines preuves indiquent que l'intim� avait beaucoup bu au moment de l'agression en 1990, rien n'indique qu'il �tait alors plong� dans un �tat de psychose provoqu� par la drogue. Si cela avait �t� le cas, il aurait probablement �t� d�clar� non responsable criminellement pour cause de troubles mentaux comme pour l'infraction initiale commise en 1978.

96 Quelle importance devrait-on alors raisonnablement accorder � la d�couverte de traces de coca�ne dans l'urine de l'intim�? Interpr�t�e comme il se doit, la preuve dans son ensemble n'�taye pas � mon avis la conclusion selon laquelle l'intim� a recommenc� depuis peu � consommer de la coca�ne, de sorte que les conditions du meurtre commis en 1978 pourraient vraisemblablement se reproduire pour la premi�re fois pr�s de 20 ans plus tard. Certes, l'intim� a toujours ni� consommer de la coca�ne. Il a cependant admis qu'il n'avait pour ainsi dire jamais arr�t� de consommer de la drogue depuis qu'il est d�tenu, mise � part une p�riode de 18 mois pr�c�dant la naissance de son fils, et on a d�cel� des traces de coca�ne dans son urine lorsqu'il n'a pas r�ussi � d�jouer le test. Il n'est pas raisonnable au vu du dossier de conclure � la pr�sence d'amph�tamines lors du meurtre commis en 1978 (et aussi, ce qui est clairement faux, lors de l'agression commise en 1990), puis � leur absence - ce qui justifiait la lib�ration de l'intim� entre 1994 et 1999 - et enfin � leur r�apparition, qui cr�erait cette nouvelle situation de dangerosit� en raison des similitudes entre les effets de la coca�ne et ceux des amph�tamines.

97 En r�alit�, il est plus probable que l'intim� ait consomm� r�guli�rement de la drogue et de l'alcool tout au long de sa d�tention sous la surveillance de la Commission et qu'il ait pu, la plupart du temps, �viter de se faire prendre en d�jouant les tests de d�pistage. Au cours des 22 ann�es �coul�es depuis la perp�tration de l'infraction initiale, l'intim� n'a jamais montr� de signes d'une psychose semblable � celle qui l'a amen� � commettre le meurtre en 1978, bien qu'il ait commis des infractions � l'occasion et qu'il n'ait jamais cess� de consommer de la drogue. La seule inf�rence qu'il convient de tirer de cette preuve est que l'intim� est relativement inoffensif depuis bon nombre d'ann�es, non pas parce qu'il est demeur� sobre, mais plut�t malgr� l'alcool et les drogues qu'il a continu� � consommer tout au long de cette p�riode. Il n'est pas plausible de tenir pour acquis simplement parce qu'il le pr�tend, que l'intim� n'a pas pris de coca�ne ni de drogues semblables depuis qu'il a consomm� des m�thamph�tamines en 1978. En fait, je m'explique difficilement que la Commission se soit servie du test du 25 janvier 2000 qui a r�v�l� la pr�sence de coca�ne pour appuyer sa nouvelle �valuation de la dangerosit� de l'intim� - rejetant par le fait m�me l'affirmation de l'intim� qui disait ne pas en avoir pris avant le test - tout en tenant par ailleurs pour acquis que l'intim� avait soudainement recommenc� � consommer de la coca�ne, m�me s'il a admis avoir tromp� le personnel de l'h�pital quant aux tests d'urine ant�rieurs.

98 La psychose qui a amen� l'intim� � perp�trer l'infraction initiale �tait le r�sultat momentan� de son ingestion d'amph�tamines et la d�pendance de M. Owen aux drogues (marijuana et, pour reprendre ses termes, [TRADUCTION] "un tas d'autres choses") et son alcoolisme ne l'ont pas amen� � commettre des actes de violence au cours des dix derni�res ann�es, ni emp�ch� de [TRADUCTION] "bien [se d�brouiller] pour s'occuper de son jeune fils et vivre en paix au sein de la collectivit� malgr� ses tr�s maigres ressources".

99 Pour d�terminer si l'accus� repr�sente un risque important pour la s�curit� du public, la Commission doit prendre en compte tous les facteurs �num�r�s � l'art. 672.54, soit non seulement la n�cessit� de prot�ger le public face aux personnes dangereuses, mais �galement l'�tat mental de l'accus�, ses besoins et la n�cessit� de sa r�insertion sociale. Si l'�tat mental de l'accus� est tel qu'il ne souffre d�sormais plus de troubles mentaux, on ne devrait pas confondre son �tat mental avec sa propension � commettre des crimes. � cet �gard, il ne devrait pas �tre trait� diff�remment d'une autre personne : il doit subir les sanctions impos�es en mati�re p�nale.

100 Le r�gime de d�tention pour cause de troubles mentaux vise � pr�venir la r�p�tition des actes dangereux auxquels la personne atteinte risque de se livrer et dont elle ne serait pas tenue criminellement responsable. Ainsi que l'a �nonc� notre Cour dans l'arr�t Winko, au par. 57 :

Pour que ces dispositions du Code criminel s'appliquent, le risque ne doit pas �tre purement hypoth�tique; il doit �tre �tay� par la preuve : D.H. c. British Columbia (Attorney General), [1994] B.C.J. No. 2011 (QL) (C.A.), au par. 21. Le risque doit par ailleurs �tre "important". Non seulement le risque qu'un pr�judice physique ou psychologique soit inflig� aux membres de la collectivit� doit �tre v�ritable, mais ce pr�judice appr�hend� doit �tre grave. Un risque minime de pr�judice grave ne suffit pas, non plus qu'un risque �lev� de pr�judice insignifiant. Enfin, la conduite ou l'activit� pr�judiciable doit �tre de nature criminelle.

101 � mon sens, la Cour d'appel a correctement conclu que la Commission avait puni � tort l'intim� pour avoir r�ussi � tromper le personnel de l'h�pital quant � sa consommation de drogue. La Commission semble avoir accept� l'�valuation du risque qui figurait dans le rapport soumis par l'administrateur de l'h�pital et dont elle cite les extraits suivants :

[TRADUCTION]

�valuation du risque :

	M. Owen repr�sente un risque important pour la s�curit� du public. Il a d�montr� que, m�me sous surveillance �troite, il adopte des comportements qui pourraient exposer le public � un danger. Ce qu'il y a de plus inqui�tant, c'est la pr�sence de coca�ne, de par ses effets semblables aux amph�tamines qu'il avait prises lorsqu'il a commis l'infraction initiale et qui l'ont plong� dans un �tat de parano�a provoqu� par la drogue.
	Sans une surveillance directe et constante, notre �quipe n'est pas convaincue de pouvoir emp�cher M. Owen de se livrer � des actes hautement risqu�s qui sont susceptibles d'accro�tre sensiblement la probabilit� d'une r�cidive.

102 La Commission a ensuite comment� en ces termes les changements survenus dans la situation de M. Owen :

[TRADUCTION] Malheureusement, M. Owen a choisi de ralentir sa progression vers la r�adaptation et d'entraver les efforts d�ploy�s par ses aidants pour le r�int�grer dans la soci�t�. Nous notons que d�s ao�t 1999, l'�quipe de traitement �tait dispos�e � appuyer son transfert dans la r�gion de Chatham, qui demeure encore aujourd'hui l'endroit o� M. Owen d�sire �tre relocalis�. Par son comportement, M. Owen a �t� l'artisan de son propre malheur, bien qu'il soit improbable qu'il reconnaisse ou qu'il appr�cie son r�le dans ce qu'il consid�rera sans aucun doute comme une punition que lui infligent la Commission d'examen et l'h�pital.

103 Le raisonnement de l'h�pital et de la Commission pose probl�me en ce que, si M. Owen est incapable de vaincre sa toxicomanie et son alcoolisme - ce qui semble probable -, il sera d�tenu pour le reste de sa vie dans un h�pital psychiatrique en d�pit du fait qu'il ne souffre d'aucune maladie mentale, qu'il a v�cu sans incident pendant dix ans au sein de la collectivit� en s'occupant de son fils et qu'il sera presque assur�ment tenu criminellement responsable des nouvelles infractions qu'il pourrait commettre. Un rapport d'h�pital dat� de 1996 illustre le probl�me que cr�e la justification de la d�tention de l'intim� sous le r�gime de la non-responsabilit� criminelle par son manquement aux conditions qui lui interdisent la consommation de drogues. L'h�pital y avait invit� [TRADUCTION] "la Commission � s'interroger sur l'utilit� r�elle de rendre une ordonnance d'interdiction � l'�gard de M. Owen pour assurer la protection du public ou sa r�insertion sociale" :

[TRADUCTION] L'�quipe des soins cliniques continue de croire que les ant�c�dents d'abus d'alcool et d'autres drogues de M. Owen et ses probl�mes de comportement �taient g�n�ralement li�s dans le pass� et le seront probablement dans le futur. La consommation de drogue et d'alcool a donc �t� relev�e express�ment comme un facteur de risque et lui a, de ce fait, �t� interdite dans l'ordonnance. [...] M. Owen consomme de l'alcool. Il affirme aujourd'hui qu'il ne sera probablement jamais en mesure de s'abstenir enti�rement pour toujours d'en consommer et qu'il ne pourra donc jamais "se soustraire" � la comp�tence de la Commission. [...]

...

Dans le pr�sent dossier, la pr�occupation de l'h�pital tient � ce qu'on enjoint � M. Owen de s'abstenir de se livrer � une activit� l�gale pour le public en g�n�ral pendant qu'il se trouve en lib�ration conditionnelle. Si, en obtemp�rant � cette ordonnance, M. Owen a une bonne conduite, qu'est-ce que la Commission aura appris qui lui permettrait subs�quemment de conclure que M. Owen ne repr�sente d�sormais plus un risque pour la s�curit� du public et de le lib�rer inconditionnellement? L'h�pital s'inqui�te du fait que, dans ces circonstances, la Commission ne disposera jamais d'�l�ments de preuve susceptibles d'�tayer la conclusion selon laquelle, en l'absence de mesures de contr�le exceptionnelles, M. Owen ne repr�sente pas un risque important pour la s�curit� du public, � moins qu'on consente � le lib�rer conditionnellement pour ne l'assujettir qu'aux lois du pays tout en exigeant qu'il ait une bonne conduite. Le respect d'une telle ordonnance militerait probablement en faveur d'une lib�ration inconditionnelle. En cas de non-respect, M. Owen se verrait imposer des sanctions p�nales et pourrait �tre soumis � nouveau � une ordonnance de garde, avec ou sans pouvoir discr�tionnaire de l'h�pital de le placer dans la collectivit�, sous sa surveillance. (DA, p. 224-225). [Je souligne.]

Fonder la d�tention de l'intim� sous le r�gime de la non-responsabilit� criminelle sur ses probl�mes persistants d'abus d'alcool et d'autres drogues �quivaut � lui imposer un fardeau tel qu'on le prive � tout jamais de la possibilit� d'en sortir, malgr� l'absence prolong�e de tout comportement violent de sa part.

104 � mon avis, les autorit�s de l'h�pital et les membres de la Commission ont �t� ind�ment influenc�s par la d�couverte r�cente du fait que M. Owen d�jouait r�guli�rement les tests de d�pistage de drogue et d'alcool. On a toujours su que l'intim� avait de fortes chances de consommer de la drogue. Le fait pour la Commission de restreindre consid�rablement la libert� de l'intim� apr�s avoir appris qu'il avait tromp� le personnel de l'h�pital atteste que sa d�cision avait fondamentalement un caract�re punitif. Je fais mien l'avis de la Cour d'appel selon lequel l'�valuation par la Commission du risque pos� par l'intim� reposait enti�rement sur des hypoth�ses et n'�tait pas �tay�e par un examen ad�quat du dossier.

(2) L'imposition de la d�cision la plus s�v�re

105 L'article 672.54 oblige la Commission � tenir compte de plusieurs facteurs et � rendre en d�finitive la d�cision "la moins s�v�re et la moins privative de libert�". La premi�re option consiste � lib�rer inconditionnellement l'accus� dans la mesure o� la Commission estime qu'il ne repr�sente pas un risque important pour le public. Si cette option s'av�re contre-indiqu�e, la Commission peut lib�rer l'accus� sous conditions ou ordonner sa d�tention dans un h�pital sous r�serve des modalit�s qu'elle juge indiqu�es.

106 Plac� sous le r�gime de non-responsabilit� criminelle pendant vingt-deux ans, l'intim� avait d�j� fait l'objet de vingt-quatre d�cisions ou mandats lorsque la Commission a rendu la d�cision port�e en appel. Il a v�cu dans la collectivit� sous diverses formes de surveillance pendant de longues p�riodes � partir de 1986, et y a v�cu en permanence de 1994 jusqu'au prononc� de cette d�cision. Conform�ment � la d�cision rendue en mars 2000, l'intim� a �t� d�tenu dans un h�pital sans pouvoir sortir dans la collectivit�, sauf sous escorte. C'est l� la d�cision la plus privative de libert� rendue � l'�gard de l'intim� depuis celle prononc�e en 1990 � la suite de sa d�claration de culpabilit� pour voies de fait et, mise � part cette derni�re, la plus privative de libert� depuis 1982. La Commission a ordonn� la d�tention de l'intim� dans un h�pital, ne l'autorisant � s'absenter que pour des raisons humanitaires et � ne sortir dans la collectivit� qu'accompagn� par du personnel de l'h�pital. Elle n'a pas motiv� sa conclusion selon laquelle cette d�cision, extr�mement privative de libert�, �tait "la moins s�v�re et la moins privative de libert�". Cette d�cision constitue � mon avis une erreur de droit et n'�tait pas raisonnable.

107 M�me en supposant que l'intim� repr�sentait une menace pour la collectivit� suffisamment importante pour que sa lib�ration inconditionnelle soit exclue, la Commission �tait tenue d'examiner chacun des quatre facteurs �nonc�s � l'art. 672.54 - la n�cessit� de prot�ger le public face aux personnes dangereuses, l'�tat mental de l'accus�, ses besoins, ainsi que la n�cessit� de sa r�insertion sociale - pour d�cider si une lib�ration conditionnelle ou une ordonnance de garde �tait indiqu�e. La Commission ne pouvait pas s'acquitter correctement de cette t�che sans prendre en consid�ration le fait que l'intim� vivait dans la collectivit� depuis 1994, qu'il n'avait �t� impliqu� dans aucun incident violent depuis pr�s de dix ans, qu'il d�sirait �tre avec son fils et que, s'il n'avait pas r�ussi � s'abstenir de consommer de la drogue, il avait n�anmoins assez bien r�ussi, au cours des derni�res ann�es, � g�rer diverses sources de stress dans sa vie. Je suis d'avis qu'au vu des faits du dossier, il �tait d�raisonnable pour la Commission de conclure que la d�tention s'av�rait la d�cision la moins s�v�re possible dans les circonstances parce qu'elle permettait � l'intim� de jouir "d'autant de libert� que la s�curit� du public le permet" : Winko, pr�cit�, par. 9.

C. La question de la nouvelle preuve

108 Le par. 672.73(1) du Code autorise la Cour d'appel � admettre tout �l�ment de preuve "lorsqu'elle estime que la justice l'exige". La Cour d'appel n'a pas trait� dans ses motifs de la demande de pr�sentation de nouveaux �l�ments de preuve. Nous en sommes donc r�duits, dans une certaine mesure, � �mettre des hypoth�ses sur ce que la cour a d�cid� � ce sujet. Il ne fait aucun doute que la cour a pris connaissance de la preuve offerte. Nous ignorons cependant si elle a estim� que la preuve �tait mince et non concluante, n'y donnant donc aucune suite, ou si elle a tout simplement d�cid� de ne pas l'admettre, auquel cas on nous demande de statuer qu'il s'agissait d'une erreur.

109 Il ne s'agit pas d'une "nouvelle preuve" comme celle dont il �tait question dans l'arr�t Palmer c. La Reine, [1980] 1 R.C.S. 759 (c'est-�-dire une preuve pr�existante qui n'a pas �t� produite devant le tribunal de premi�re instance (en l'occurrence la Commission)). Selon l'arr�t R. c. Stolar, [1988] 1 R.C.S. 480, le crit�re d'admissibilit� d'une telle preuve en appel est �lev� mais, une fois admise, la nouvelle preuve m�ne in�vitablement � la tenue d'un nouveau proc�s (ou � une nouvelle audition), sauf dans les rares cas o�, en soi, elle s'av�rera � ce point concluante que la cour d'appel pourra agir sur la foi de cette preuve et disposer de l'affaire en cons�quence (cela se fera souvent sur consentement : voir par exemple la nouvelle preuve d'ADN qui exon�re un accus� d�clar� coupable : R. c. Morin (1995) 37 C.R. (4th) 395).

110 En l'esp�ce, la preuve a �t� soumise en vertu du Code afin que la cour l'admette parce que "la justice l'exige". Elle n'aurait de toute �vidence pas pu influencer la d�cision de la Commission puisqu'il s'agissait d'une preuve post�rieure � la d�cision. Il arrive souvent que la preuve d'une conduite post�rieure � l'infliction d'une peine soit soumise dans le cadre d'un appel de la peine pour valoir comme "mise � jour" et faire en sorte que la cour d'appel ne rende pas sa d�cision dans l'abstrait. En l'occurrence, la Cour d'appel poss�dait le pouvoir discr�tionnaire d'admettre ou non la preuve. Il ressort clairement de l'issue de l'affaire qu'elle n'y a pas donn� suite.

111 En application du paragraphe 672.78(3), si elle accueille l'appel d'une d�cision, la cour d'appel peut rendre la d�cision en vertu de l'art. 672.54 que la Commission aurait pu rendre. Elle peut �galement renvoyer l'affaire � la Commission qui, de toute mani�re, doit r�viser annuellement les d�cisions relatives � la non-responsabilit� criminelle. Dans le cours normal des choses, la "nouvelle preuve" comme celle produite en l'esp�ce devrait tout simplement �tre pr�sent�e dans le cadre de la prochaine audition tenue par la Commission. La seule question qui demeure est donc celle de savoir si la "nouvelle preuve" soumise � la Cour d'appel �tait telle qu'elle pouvait l'emp�cher de prononcer la lib�ration inconditionnelle de l'intim�.

112 Sur le fondement de l'arr�t Stolar, lorsqu'une cour d'appel est d'avis qu'un accus� non responsable criminellement aurait d� se voir accorder une lib�ration inconditionnelle au terme de l'audition de la Commission, la nouvelle preuve devrait �tablir de fa�on quasi incontestable que la lib�ration inconditionnelle serait inopportune pour que la cour d'appel d�cide de ne pas l'ordonner. En outre, je me dois de souligner que, contrairement au postulat �nonc� par mon coll�gue le juge Binnie, au par. 56, il n'appara�t pas clairement que la lib�ration inconditionnelle d'un d�tenu non responsable criminellement met un terme � la capacit� de l'�tat de surveiller et de contr�ler l'�tat mental de l'intim�. En fait, le paragraphe 672.82(1) du Code criminel pr�voit que la commission peut, "en tout temps, tenir une audition" ou, en anglais "review any of its dispositions at any time" . Lorsqu'on le compare � l'art. 672.81, qui exclut express�ment les lib�rations inconditionnelles du processus obligatoire de r�vision annuelle, le par. 672.82(1) ouvre la porte, pourrait-on soutenir, � un processus discr�tionnaire de r�vision par la Commission sur le fondement d'une nouvelle preuve de dangerosit�, m�me dans le cas d'une lib�ration inconditionnelle.

113 Quoi qu'il en soit, je suis d'avis qu'il n'y a pas lieu de toucher � l'exercice par la Cour d'appel de son pouvoir discr�tionnaire dans l'appr�ciation de la nouvelle preuve dont elle a �t� saisie. La Cour d'appel a estim�, � juste titre selon moi, que l'intim� aurait d� �tre lib�r� inconditionnellement par la Commission en mars 2000. Celle-ci a plut�t ordonn� sa d�tention assortie de conditions tr�s s�v�res et tr�s privatives de libert�. La Cour d'appel pouvait tout � fait, au vu des rapports sur la conduite de l'intim� au cours de sa d�tention, maintenir sa conclusion que l'intim� ne repr�sentait pas un risque important pour la s�curit� du public.

IV. Dispositif

114 Pour ces motifs, je suis d'avis de rejeter le pourvoi. * * * * *

Annexe A

Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46

Troubles mentaux

16. (1) La responsabilit� criminelle d'une personne n'est pas engag�e � l'�gard d'un acte ou d'une omission de sa part survenu alors qu'elle �tait atteinte de troubles mentaux qui la rendaient incapable de juger de la nature et de la qualit� de l'acte ou de l'omission, ou de savoir que l'acte ou l'omission �tait mauvais.

Verdict de non-responsabilit� criminelle

672.34 Le jury ou, en l'absence de jury, le juge ou le juge de la cour provinciale, qui d�termine que l'accus� a commis l'acte ou l'omission qui a donn� lieu � l'accusation mais �tait atteint, � ce moment, de troubles mentaux d�gageant sa responsabilit� criminelle par application du paragraphe 16(1) est tenu de rendre un verdict de non-responsabilit� criminelle pour cause de troubles mentaux.

Constitution des commissions d'examen

672.38 (1) Une commission d'examen est constitu�e ou d�sign�e pour chaque province; elle est constitu�e d'un minimum de cinq membres nomm�s par le lieutenant-gouverneur en conseil de la province et est charg�e de rendre ou de r�viser des d�cisions concernant les accus�s qui font l'objet d'un verdict de non-responsabilit� criminelle pour cause de troubles mentaux ou qui ont �t� d�clar�s inaptes � subir leur proc�s.

Membres

672.39 Doivent faire partie d'une commission d'examen au moins une personne autoris�e par le droit d'une province � exercer la psychiatrie et, s'il n'y a qu'un seul psychiatre, au moins une personne dont la formation et l'exp�rience rel�vent de la sant� mentale et qui est autoris�e par le droit d'une province � exercer la m�decine ou la profession de psychologue.

Pr�sident

672.4 (1) Sous r�serve du paragraphe (2), le pr�sident de la commission d'examen d'une province est un juge - ou un juge � la retraite - de la cour f�d�rale, d'une cour sup�rieure d'une province ou d'une cour de district ou de comt� ou une personne qui remplit les conditions de nomination � un tel poste.

Pouvoirs du pr�sident de la commission

672.43 Lors d'une audition de la commission d'examen, le pr�sident de la commission est investi des pouvoirs que les articles 4 et 5 de la Loi sur les enqu�tes accordent aux commissaires nomm�s en vertu de la partie I de cette loi.

D�finition de "Renseignements d�cisionnels"

672.51 (1) Au pr�sent article, "renseignements d�cisionnels" s'entend de la totalit� ou d'une partie du rapport d'�valuation remis au tribunal ou � la commission d'examen et de tout autre document �crit dont ils sont saisis, qui concerne l'accus� et qui est pertinent dans le cadre de la d�cision � rendre.

(2) Sous r�serve des autres dispositions du pr�sent article, les renseignements d�cisionnels sont � la disposition des autres parties et de l'avocat qui, le cas �ch�ant, repr�sente l'accus�; le tribunal ou la commission leur en fait parvenir une copie.

D�cisions

672.54 Pour l'application du paragraphe 672.45(2) ou de l'article 672.47, le tribunal ou la commission d'examen rend la d�cision la moins s�v�re et la moins privative de libert� parmi celles qui suivent, compte tenu de la n�cessit� de prot�ger le public face aux personnes dangereuses, de l'�tat mental de l'accus� et de ses besoins, notamment de la n�cessit� de sa r�insertion sociale :

a)		lorsqu'un verdict de non-responsabilit� criminelle pour cause de troubles mentaux a �t� rendu � l'�gard de l'accus�, une d�cision portant lib�ration inconditionnelle de celui-ci si le tribunal ou la commission est d'avis qu'il ne repr�sente pas un risque important pour la s�curit� du public;
b)		une d�cision portant lib�ration de l'accus� sous r�serve des modalit�s que le tribunal ou la commission juge indiqu�es;
c)		une d�cision portant d�tention de l'accus� dans un h�pital sous r�serve des modalit�s que le tribunal ou la commission juge indiqu�es

Appel sur le fondement du dossier

672.73 (1) L'appel est fond� sur la transcription d�pos�e aupr�s de la cour d'appel et sur les autres �l�ments de preuve dont la cour d'appel accepte la pr�sentation lorsqu'elle estime que la justice l'exige.

Pouvoirs de la cour d'appel

a)		la d�cision ou l'ordonnance est d�raisonnable ou ne peut pas s'appuyer sur la preuve;
b)		il s'agit d'une erreur de droit;
c)		il y a eu erreur judiciaire.

(2) La cour d'appel peut rejeter l'appel, dans l'un ou l'autre des cas suivants :

a)		les alin�as (1)a), b) et c) ne s'appliquent pas;
b)		l'alin�a (1)b) peut s'appliquer, mais elle est d'avis qu'aucun tort important ou aucune erreur judiciaire ne s'est produit.

(3) La cour d'appel, si elle accueille l'appel, peut :

a)		rendre la d�cision en vertu de l'article 672.54 ou l'ordonnance de placement que la commission d'examen aurait pu rendre;
b)		renvoyer l'affaire au tribunal ou � la commission d'examen pour une nouvelle audition, compl�te ou partielle, en conformit� avec les instructions qu'elle lui donne;
c)		rendre toute autre ordonnance que la justice exige.

R�visions

672.81 (1) La commission d'examen qui a rendu une d�cision � l'�gard d'un accus� tient une nouvelle audition au plus tard douze mois apr�s la d�cision et � l'int�rieur de chaque p�riode de douze mois suivante si la d�cision rendue en vertu de ces alin�as est toujours en vigueur, � l'exception d'une lib�ration inconditionnelle prononc�e en vertu de l'alin�a 672.54a).

R�visions suppl�mentaires facultatives

672.82 (1) La commission d'examen peut, en tout temps, tenir une audition � la demande de l'accus� ou de toute autre partie.

(2) Lorsqu'une r�vision d'une d�cision vis�e par un appel interjet� par une partie en vertu de l'article 672.72 commence � la demande de cette partie, l'appel est r�put� avoir �t� abandonn�.

* * *

Criminal Code, R.S.C. 1985, c. C-46

Defence of mental disorder

16. (1) No person is criminally responsible for an act committed or an omission made while suffering from a mental disorder that rendered the person incapable of appreciating the nature and quality of the act or omission or of knowing that it was wrong.

Verdict of not criminally responsible on account of mental disorder

672.34 Where the jury, or the judge or provincial court judge where there is no jury, finds that an accused committed the act or made the omission that formed the basis of the offence charged, but was at the time suffering from mental disorder so as to be exempt from criminal responsibility by virtue of subsection 16(1), the jury or the judge shall render a verdict that the accused committed the act or made the omission but is not criminally responsible on account of mental disorder.

672.38 (1) A Review Board shall be established or designated for each province to make or review dispositions concerning any accused in respect of whom a verdict of not criminally responsible by reason of mental disorder or unfit to stand trial is rendered, and shall consist of not fewer than five members appointed by the lieutenant governor in council of the province.

Members of Review Board

672.39 A Review Board must have at least one member who is entitled under the laws of a province to practise psychiatry and, where only one member is so entitled, at least one other member must have training and experience in the field of mental health, and be entitled under the laws of a province to practise medicine or psychology.

Chairperson of a Review Board

672.4 (1) Subject to subsection (2), the chairperson of a Review Board shall be a judge of the Federal Court or of a superior, district or county court of a province, or a person who is qualified for appointment to, or has retired from, such a judicial office.

Powers of Review Boards

672.43 At a hearing held by a Review Board to make a disposition or review a disposition in respect of an accused, the chairperson has all the powers that are conferred by sections 4 and 5 of the Inquiries Act on persons appointed as commissioners under Part I of that Act.

672.51 (1) In this section, "disposition information" means all or part of an assessment report submitted to the court or Review Board and any other written information before the court or Review Board about the accused that is relevant to making a disposition.

(2) Subject to this section, all disposition information shall be made available for inspection by, and the court or Review Board shall provide a copy of it to, each party and any counsel representing the accused.

Dispositions that may be made

672.54 Where a court or Review Board makes a disposition pursuant to subsection 672.45(2) or section 672.47, it shall, taking into consideration the need to protect the public from dangerous persons, the mental condition of the accused, the reintegration of the accused into society and the other needs of the accused, make one of the following dispositions that is the least onerous and least restrictive to the accused:

(a)		where a verdict of not criminally responsible on account of mental disorder has been rendered in respect of the accused and, in the opinion of the court or Review Board, the accused is not a significant threat to the safety of the public, by order, direct that the accused be discharged absolutely;
(b)		by order, direct that the accused be discharged subject to such conditions as the court or Review Board considers appropriate; or
(c)		by order, direct that the accused be detained in custody in a hospital, subject to such conditions as the court or Review Board considers appropriate.

Appeal on the transcript

672.73 (1) An appeal against a disposition by a court or Review Board or placement decision by a Review Board shall be based on a transcript of the proceedings and any other evidence that the court of appeal finds necessary to admit in the interests of justice.

672.78 (1) The court of appeal may allow an appeal against a disposition or placement decision and set aside an order made by the court or Review Board, where the court of appeal is of the opinion that

(a)

it is unreasonable or cannot be supported by the evidence;

(b)		it is based on a wrong decision on a question of law; or
(c)		there was a miscarriage of justice.

(2) The court of appeal may dismiss an appeal against a disposition or placement decision where the court is of the opinion

(a) that paragraphs (1)(a), (b) and (c) do not apply; or

(b)

that paragraph (1)(b) may apply, but the court finds that no substantial wrong or miscarriage of justice has occurred.

(3) Where the court of appeal allows an appeal against a disposition or placement decision, it may

(a)		make any disposition under section 672.54 or any placement decision that the Review Board could have made;
(b)		refer the matter back to the court or Review Board for re-hearing, in whole or in part, in accordance with any directions that the court of appeal considers appropriate; or
(c)		make any other order that justice requires.

Mandatory review of dispositions

672.81 (1) A Review Board shall hold a hearing not later than twelve months after making a disposition and every twelve months thereafter for as long as the disposition remains in force, to review any disposition that it has made in respect of an accused, other than an absolute discharge under paragraph 672.54(a).

Discretionary review on request

672.82 (1) A Review Board may hold a hearing to review any of its dispositions at any time, at the request of the accused or any other party.

(2) Where a party requests a review of a disposition under this section, the party is deemed to abandon any appeal against the disposition taken under section 672.72.

QL Update: 20030606
cp/e/qlhbb